Générique de fin #1

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Lorsqu’à la fin du film, le générique jaune a entamé sa remontée vers le sommet de la télé, j’ai décidé de mettre mon plan à exécution sur l’heure.

Surtout, ne plus tergiverser.

Fini les on verra plus tard, c’est pas le moment, je ne suis pas encore prêt.

Terminé les c’est trop risqué.

Rideau sur les reculades.

New York, j’en rêvais depuis mon premier Scorcese, alors maintenant, il fallait oser.

Partir. Émigrer.

Dehors, la tempête se déchaînait.

(à suivre)

Soudain, de la grêle partout

L’orage n’a duré qu’une poignée de minutes. Suffisamment pour coiffer la ville d’un blanc grêlé qui nous a fait retomber en hiver. Dans le ciel gris sale, j’ai lu comme un écoeurement teinté de vilaine pitié pour ce pays, notre pays, – et notamment ma région – qui se laisse meurtrir sans trop broncher par les assassins d’horizon.

horizon

Cette photo est signée Candice Nguyen. Elle l’a postée sur Twitter dimanche-soir depuis Marseille. Comme moi, elle voyage avec les mots, les sons et les lumières du monde. Je vous recommande son superbe blog. C’est par ici.

Le feuilleton Dylan de François Bon #1

Un enchantement. Comme un cadeau surgi de l’enfance. Bob Dylan suivi pas à pas dans cette Amérique des années 40, depuis Hibbing et ses mines de fer jusqu’à New York et ses promesses. Robert Allen Zimmerman accompagné avec gourmandise par l’écrivain François Bon. Cette merveille de biographie sonore, j’en ai savouré le premier volet comme l’on se laisse aller à déguster un gros gâteau à la crème, avec plein de pépites dedans. La voix de Bob. Les textes de Bob. Les mélodies de Bob et de ceux qui furent à la source de son formidable appétit de devenir artiste, de raconter le monde. Son monde de fils d’immigrés juif dont les parents fuirent les pogroms pour le Minnesota au début du siècle passé. Le passé. Notre passé commun. Comment pousser les bords du monde m’a plongé tout entier dans le  souvenir de ces vinyls de Dylan achetés par mon père pacifiste. J’étais un tout jeune ado marseillais qui grandissait dans l’abhorration de la guerre. De toutes les guerres et donc de la guerre du Vietnam que Dylan dénonçait avec cette vigueur, cette radicalité qui nous saisissait, nous soudait aux côtés des ces Américains-là. Ce feuilleton, je l’ai découvert hier sur le tiers livre, le site que fait vivre François Bon depuis 1997. 15 épisodes il comporte – je vais de ce pas en découvrir le second épisode – ainsi qu’un dossier Bob Dylan. Il fut à l’origine diffusé sur France Culture en 2007. Puis rediffusé en 2011. Si vous vous autorisez à être gourmand comme moi, vous dénicherez dans ce tiers livre – le Tiers État, ça vous parle à vous aussi ? – d’autres feuilletons et bien d’autres nourritures – littéraires notamment – qui font du bien à l’âme, ce qui ne se refuse pas en ce début de printemps pourri par l’abstention et par les aboiements de ces « assassins d’aube » auquel Aimé Césaire nous dit qu' »il n’est pas question de livrer le monde. »

dylanbiofrançoisbon

François Bon est également l’auteur de cette biographie chez Albin Michel.

Jo est un autre #intégral

Le port était pourtant si calme ce soir.

Plus personne au pied des bateaux. Plus un docker sur les grues.

Un décor fin d’époque.

 

Cinq heures que je jouais avec toi face à la mer, mon Jo, je ne les ai pas entendus approcher.

Ils sont revenus en traître. Dans notre dos.

Les salauds !

Lorsque je les ai aperçus, ils avaient déjà lâché leurs dobermans.

J’ai tout de suite pensé à sauver ta peau, mon bijou.

Je t’ai enveloppé dans ta cape noire et tu es passé par dessus quai.

Puisse la houle te serrer dans ses bras et t’accompagner jusqu’à la digue du large.

Cette digue qui nous est si familière.

Là-bas, tu seras peut-être à l’abri du danger.

 

Personne n’imaginait que les chantiers fermeraient si vite.

Personne ne se doutait que les navires usés devraient un jour aller chercher fortune ailleurs.

Depuis quarante ans, ils arrivent de partout pour se faire réparer chez nous : rouliers grecs, paquebots russes, asphaltiers hollandais, céréaliers chinois, bananiers ivoiriens et ferries corses bien sûr.

A chacune de leurs escales, nous accourons les accueillir dans la rade, toi et moi.

Fiers d’être les descendants de Pythéas.

 

Les sorties en chaloupe pour se ruer à leur rencontre, tu n’en as raté aucune, mon Jo.

A l’approche de leurs coques géantes, nous nous risquons sur la proue.

Tu viens contre ma poitrine et je ferme les yeux tandis que là-haut, les marins t’applaudissent tellement tu es beau.

Une fois à quai, je les laisse t’effleurer. Bouche bée.

Je suis sûr qu’ ils n’ont jamais imaginé pareille merveille.

Dans aucun port.

Parfois, ils osent même un baiser sur tes joues rondes.

Je fais mine de ne rien voir et nous partons jouer au soleil sur la jetée.

Pour l’instant, la voie est libre.

Tu avances vers le large, en frissonnant dans le ressac.

Le crépuscule approche. J’ai peur que tu attrapes froid.

 

Lorsque je t’emmène au coeur des ateliers, tu n’en crois pas tes yeux.

Un décor d’opéra dans un espace de cathédrale.

Aux quatre coins des hangars ouverts aux courants d’air, un râle de ferraille et de feu.

Un gigantesque ronflement de moteurs, de fraiseuses, de presses et de tours avec de grosses mains autour.

Au travail, les machines hurlent et les hommes se taisent.

Quelquefois, c’est l’inverse.

A la pause, en sourdine, nous essayons d’accompagner ce brassage de langues et d’accents.

Tu es plus doué que moi pour l’improvisation, mon Jo.

Je n’ai jamais eu ni coffre, ni voix. A peine un peu d’oreille.

Toi, tu ne vis que pour ces instants où les sons se mêlent, se jaugent, se défient.

Je tente de te suivre de mon mieux.

Tu sais bien que mes mains ne t’abandonnent jamais.

 

Je me mords les doigts pour ne pas crier.

Un zodiac vient de te frôler à toute allure.

Dans son sillage d’écume, tu danses comme un bouchon.

Ma curiosité nous pousse parfois jusqu’aux formes où sont opérés les bateaux fatigués par des années de traversées.

Tu adores y descendre dans mon dos.

Tout au long de l’échelle tu trembles, tu te cramponnes, tu te fais lourd, mais une fois au fond, tu es content mon Jo, je le sens bien.

Le ventre des navires t’inspire.

Tu veux en explorer chaque recoin. Y laisser ta trace.

Dans la salle des machines, il faut même que je te surveille de près.

Le rythme des pistons et des vilbrequins te donne la bougeotte.

Leurs trépidations t’affolent.

Ta peau dorée d’aristocrate se marie bien aux relents de cambouis brûlant.

Si je ne te retenais pas, mon Jo, tu serais capable d’aller te frotter aux bleus des mécaniciens.

Je te laisse leur offrir nos airs préférés, à ces horlogers de la mer, malgré le vacarme.

 

Un jour, hypnotisé par les vibrations, tu t’es retrouvé happé vers l’hélice d’un moteur de cargo.

Dieu sait comment, je t’ai sauvé in extremis.

Je t’aurais pilé.

Depuis, même si je t’entends ronchonner, j’abrège les visites.

Je ne suis rassuré que lorsque nous sommes de retour au grand air.

Toi, tu ne rêves que de redescendre plonger auprès des hommes de l’art.

Ces hommes que l’on abandonne aujourd’hui dans le plus assourdissant des silences.

 

Encore quelques minutes et tu disparaîtras derrière les blocs blancs de la digue.

Je prie pour que tu sois recueilli avant la nuit.

Les doberman me saisissent à la gorge.

Ils me broient les chevilles.

Je cherche à hurler ton nom, mon Jo, mais je n’ai plus de voix.

En m’écroulant dans le bassin de radoub, je me souviens : tout à l’heure, un gros flic à lunettes m’a lancé

– vous vous prenez pour Rostropovitch ?

La Voie Lactée de Moussu Sivan

Revenir aux fondamentaux en ce lundi de tristesse et de colère post-électorales. Jean-Pierre Sivan est atsrophysicien, président du Comité Archimède qui travaille pour la diffusion au plus grand nombre de la culture scientifique dans la région PACA. Je l’avais rencontré à Marseille il y a quelques années alors qu’il était Directeur de l’Observatoire astronomique Marseille-Provence et de l’Observatoire de Haute-Provence. Il m’avait raconté les étoiles en Provençal. Bonheur de regarder avec lui vers le ciel et de se poser à sa juste place.

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Le ciel étoilé de Vincent Van Gogh.

Jo est un autre #7

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Si je ne te retenais pas, mon Jo, tu serais capable d’aller te frotter aux bleus des mécaniciens.

Je te laisse leur offrir nos airs préférés, à ces horlogers de la mer, malgré le vacarme.

Un jour, hypnotisé par les vibrations, tu t’es retrouvé happé vers l’hélice d’un moteur de cargo.

Dieu sait comment, je t’ai sauvé in extremis.

Je t’aurais pilé.

Depuis, même si je t’entends ronchonner, j’abrège les visites.

Je ne suis rassuré que lorsque nous sommes de retour au grand air.

Toi, tu ne rêves que de redescendre plonger auprès des hommes de l’art.

Ces hommes que l’on abandonne aujourd’hui dans le plus assourdissant des silences.

 Encore quelques minutes et tu disparaîtras derrière les blocs blancs de la digue.

Je prie pour que tu sois recueilli avant la nuit.

 Les doberman me saisissent à la gorge.

Ils me broient les chevilles.

Je cherche à hurler ton nom, mon Jo, mais je n’ai plus de voix.

En m’écroulant dans le bassin de radoub, je me souviens : tout à l’heure, un gros flic à lunettes m’a lancé

– vous vous prenez pour Rostropovitch ?

Jo est un autre #6

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Je me mords les doigts pour ne pas crier.

Un zodiac vient de te frôler à toute allure.

Dans son sillage d’écume, tu danses comme un bouchon.

 Ma curiosité nous pousse parfois jusqu’aux formes où sont opérés les bateaux fatigués par des années de traversées.

Tu adores y descendre dans mon dos.

Tout au long de l’échelle tu trembles, tu te cramponnes, tu te fais lourd, mais une fois au fond, tu es content mon Jo, je le sens bien.

Le ventre des navires t’inspire.

Tu veux en explorer chaque recoin. Y laisser ta trace.

Dans la salle des machines, il faut même que je te surveille de près.

Le rythme des pistons et des vilbrequins te donne la bougeotte.

Leurs trépidations t’affolent.

Ta peau dorée d’aristocrate se marie bien aux relents de cambouis brûlant.

(à suivre)

Si j’étais maire de Marseille

 

C’est Papet Jali, le MC globe trotter raggamuffin vagabond qui chante cette chanson de circonstance. En ce dimanche de premier tour des élections municipales, je l’ai choisie pour sa bonne humeur qui peut inciter à se rendre en chantant vers son bureau de vote. Et puis parce que je partage sa préoccupation de voir « Le FN remplacer le Front Populaire ».  À Marseille et dans nombre d’autres endroits de notre pays. Aujourd’hui – et dimanche prochain itou – surtout ne pas s’abstenir. Ni de chanter. Ni de voter. En n’oubliant pas que comme l’écrivait Aimé Césaire, « Il n’est pas question de livrer le monde – de livrer Marseille – aux assassins d’aube« . Le site de Papet J, c’est par ici.

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Papet Jali – René Mazzarino sur son passeport – est l’auteur de cette chanson, composée avec M. Forestal et 149 Band*, enregistrée au 149 studio par Greg Lampis.
*Le 149 Band :  Drums: Maxime Dormoy à la batterie, Patrice Taboni à la basse, Vinciane Hasnberger au clavier, Alex Ginanneschi à la guitare, Lilian Delhotellerie à la percussion et Greg Lampis au sax.

Jo est un autre #5

P1010766Pour l’instant, la voie est libre.

Tu avances vers le large, en frissonnant dans le ressac.

Le crépuscule approche. J’ai peur que tu attrapes froid.

 Lorsque je t’emmène au coeur des ateliers, tu n’en crois pas tes yeux.

Un décor d’opéra dans un espace de cathédrale.

Aux quatre coins des hangars ouverts aux courants d’air, un râle de ferraille et de feu.

Un gigantesque ronflement de moteurs, de fraiseuses, de presses et de tours avec de grosses mains autour.

Au travail, les machines hurlent et les hommes se taisent.

Quelquefois, c’est l’inverse.

A la pause, en sourdine, nous essayons d’accompagner ce brassage de langues et d’accents.

Tu es plus doué que moi pour l’improvisation, mon Jo.

Je n’ai jamais eu ni coffre, ni voix. A peine un peu d’oreille.

Toi, tu ne vis que pour ces instants où les sons se mêlent, se jaugent, se défient.

Je tente de te suivre de mon mieux.

Tu sais bien que mes mains ne t’abandonnent jamais.

(à suivre)

La Harley du Vallon des Auffes

Marseille. Vallon des Auffes l’autre soir. Une Harley Davidson prend son temps et finit par remonter vers Endoume. Je n’ai jamais mené de moto de ma vie. Si j’en avais l’opportunité, c’est une Harley que je choisirais. Pour le son rond et puissant du moteur. Pour l’évocation des interminables routes américaines qui traversent les USA. Pour le look aussi de ces motards souvent mystérieux et taiseux, accrochés à des guidons hauts comme des grands huit, les bottes posées sur des appui-pieds aussi larges que des passerelles de bateaux.