Octobre rouge #8

Octobre rouge

Anéanti, il m’a fallu passer la tête sous le robinet de l’évier pour réaliser que je venais de cauchemarder.

Trop d’alcool dans les veines.

Je m’étais affalé sur le canapé de la cuisine à peine franchie la porte d’entrée.

Ivre mort.

Toi, tu n’avais pas cassé ta nuit d’un millimètre, mon ange.

Les bras en croix et les poings serrés, tu dormais profond, à peine agitée de ci de là par quelque songe.

(à suivre)

Paroles de Soupe aux Livres

Ce fut la 138ème Soupe aux Livres l’autre soir à Mouans-Sarthoux dans les Alpes-Maritimes. 138 veillées à l’ancienne organisées par Jean et Marie des Éditions Parole. À chacune d’entre elles viennent se lire, se réciter, se chanter ou même aussi parfois se slamer les textes de son choix. Ce qui en fait la réussite, c’est le plaisir de partager les mots écrits et puis le bol de soupe et le verre de vin à la mi-temps de la soirée. Pas loin de 80 personnes présentes l’autre soir dans l’une des salles du château de Mouans-Sarthoux où a lieu chaque année depuis plus d’un quart de siècle un Festival du Livre, organisé par l‘Office Mouansois Action Jeunesse et les Amis de la Médiathèque. La prochaine Soupe aux Livres aura lieu le 26 avril à La Palud-sur-Verdon dans les Alpes de Haute-Provence.

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Le monde à l’envers…

2.000 dans les rues de Marseille hier après-midi. Pas plus… Dans la deuxième ville de France. Colorée et assez joyeuse parfois la manif contre l’austérité, mais bon, à peine 2.000 personnes rassemblées en haut de la Canebière, j’ai trouvé que ça faisait un peu riquiqui. Je dois avoir beaucoup vieilli. Me souviens des manifs de ma jeunesse. Il restait encore beaucoup de monde aux Réformés lorsque la tête du cortège arrivait sur le Vieux-Port, tout en bas. Il paraît que nombreux sont ceux qui ont préféré monter manifester à Paris. Même dans les rangs de cette gauche-là, on a du mal à ne pas « tourner à l’envers », à échapper à la maladie du centralisme… Et puis hier, sur le Vieux Port, c’était le défilé de Carnaval…JC

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Octobre rouge #7

Octobre rouge

Une nuit, j’ai bien cru qu’ils t’avaient enlevée.

Personne dans le lit.

Rien qu’un mot déposé près de l’oreiller :

« Adieu, Arthur ! Surtout, ne perdez pas de temps à tenter de la rechercher. Votre fille est déjà loin, très loin. »

Anéanti, il m’a fallu passer la tête sous le robinet de l’évier pour réaliser que je venais de cauchemarder.

Trop d’alcool dans les veines.

Je m’étais affalé sur le canapé de la cuisine à peine franchie la porte d’entrée. Ivre mort.

(à suivre)

Le chant mystérieux des grenouilles et des crapauds dans mon quartier

Derrière ce portail rouillé au détour d’une rue de mon quartier, il y a un jardin. Au fond de ce jardin, sans doute une mare ou bien un bassin où la nuit, grenouilles et crapauds s’en donnent à coeur joie. Mystérieux chant que le chant de ces batraciens. Tout aussi mystérieux que les sons donnés à entendre hier par l’artiste sonore Thomas Tilly, invité de Thomas Baumgartner dans l’Atelier de la création sur France Culture.

Octobre rouge #6

Octobre rouge

A la fonte de mes ultimes économies, j’ai commencé à multiplier les randonnées nocturnes.

A la recherche de quelque liasse embusquée dans les beaux quartiers.

La dîme révolutionnaire, j’appelais ça.

Papa va prendre l’air en cyclo, je te disais, sac au dos et casque au poing.

Il fait trop froid et trop noir pour te chaler.

Toi, tu comprenais.

Tu patientais au creux de ta couette et je te retrouvais anéantie de sommeil, le front reposé et les yeux dédiés à tes rêves.

A peine éclairée par la timide veilleuse que je t’avais laissée.

(à suivre)

 

Octobre rouge #5

Octobre rouge

Dès lors, je t’ai emmenée partout. Dans les campagnes et dans les ports.

Bien à l’abri des remous et des sursauts.

A chaque fois loin de Marseille.

Décidé à t’épargner les tracas de la traque.

Soucieux de t’éviter le remue-ménage quotidien des déménagements.

A chaque jour, un programme sur mesure.

Point d’école, point de discipline, point de règle ni de cahier.

Juste quelques grappes de jeux et d’exercices pour que tu apprennes à grignoter la vie, à cheminer à ton allure, de tes petits pas de poupée.

Tu en redemandais.

Tu étais ma reine hilare et sereine, ma bobine de coton doux, ma pêche de vigne, mon joli scoubidou.

(à suivre)

Au Jardin Missak Manouchian

Il veille sur le port et pourtant il lui tourne le dos. Missak Manouchian. Le héros de l’Affiche rouge. J’ignore qui a eu l’idée de ne pas le tourner vers la mer. Cette mer qui vit tant et tant d’Arméniens – entre autres – débarquer un jour pour s’installer à Marseille. La statue du militant et résistant communiste trône dans un petit square qui depuis février 2010 surplombe le Vieux et le nouveau port de Marseille, ainsi que les bassins de la Joliette. Son visage est grave, empreint de tristesse, de courage et de fierté. C’est celui qu’il afficha devant les nazis venus l’arrêter, puis le torturer et le fusiller le 21 février 1944, ainsi que 22 de ses camarades des FTP-MOI (francs-tireurs et partisans – main d’oeuvre immigrée). Ce jardin est fréquenté par les oiseaux. Par quelques sans abri aussi parfois. Je le perçois comme un no man’s land entre le port tout en bas et le boulevard Charles Livon et sa circulation.  C’est un lieu de mémoire que viennent fleurir chaque année une ribambelle d’élus et de Marseillais d’origine arménienne. Je viens souvent m’y recueillir. Je n’oublie pas ceux qui donnèrent leur vie pour combattre contre la barbarie nazie.

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Après avoir salué Missak, je suis descendu vers la mer.

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Le clip « L’Affiche Rouge » de KH et les déserteurs, c’est par ici.

 

Marina, passion ballon

Descendre en ville en bus – à Marseille, d’où que l’on parte pour rejoindre le centre, on descend en ville –  et croiser Marina, 14 ans,  avec ses copains Ibrahim et Mohammed. Paquets de chips en main, maillots du Barça et de l’OM sur le dos. De retour de leur entraînement de ballon – ici, nous disons jouer au ballon plutôt que jouer au foot, aller au ballon plutôt qu’aller au stade – ils sont tous trois de bonne humeur.

BONNEVEINE

De retour au quartier, passé devant le stade  où s’entraînent les équipes du Sporting Club Montredon Bonneveine. Je me suis souvenu du magnifique portfolio de Patrick Artinian publié sur Mediapart : « Football tout terrain à Marseille » – hélas sans la moindre footballeuse – dont voici  l’une des 20 photos.

ART_Marseille00072_0© Patrick Artinian

Octobre rouge #4

Octobre rouge

L’arme absolue qui dévaste pour la vie.

Automatiquement privé d’enfant.

Tarif applicable à chaque “parasite”.

C’est ainsi qu’ils nous nommaient, nous, les dépossédés de tout.

Les damnés de la croissance. Les exclus des agapes boursières. Les désespérés de la rentabilité.

“Le bagne moderne, ça va les faire réfléchir”, ils disaient à la radio.

Les télés reprenaient. Les journaux relayaient. Sans sourciller.

Titres larges et papiers grassouillets.

Toi, tu ne savais pas encore lire l’alphabet.

(à suivre)