Pas facile de quitter Joseph Ponthus. Surtout lorsque au détour d’un article paru dans le dernier numéro de l’Humanité-Dimanche, je tombe sur ces mots d’un autre Joseph, Andras, auteur du livre Ainsi nous leur faisons la guerre : « On imagine mal comment travailler à une société plus digne, plus juste, en continuant de fermer les yeux sur le fait que, chaque jour, en France, trois millions d’individus animaux sont tués dans des abattoirs sans raison valable… » Ce livre, je viens tout juste de finir de le dévorer. À travers trois tableaux inspirés de faits réels, il dépeint la cruauté de nous autres humains envers les animaux. En voici un extrait. Lu à voix haute, bien sûr :
Qu’aurait pensé Joseph Ponthus de ce texte ? Il s’y serait sans doute retrouvé. J’imagine les deux Joseph se rencontrant pour échanger à propos de leurs livres, si différents et proches à la fois. La rencontre n’aura hélas jamais lieu. Mais ils se parlent, j’en suis sûr, tout comme leurs deux livres me parlent et me questionnent. Au-delà de l’absence. Au-delà du deuil.
Le moment est donc venu de tourner la page Joseph. Bien sûr, d’autres textes à lire à voix haute et à partager m’accompagnent et m’accompagneront. Mais À la ligne Feuillets d’usine restera unique. Il m’a tant remué ce livre, jour après jour depuis début mars, que j’en reste rincé, vidé, tari. A sonné l’heure de me mettre en jachère et de m’éloigner du web. J’en ressens le désir et le besoin. Sur mon île numérique, j’ai emporté des livres et mon cello. Hier-soir, j’ai joué Mélancolie, un petit morceau de Chopin pour Joseph Ponthus. Je me suis appliqué. Juste avant de quitter la maison, je suis allé le saluer à la place qui est sienne dans ma bibliothèque. Tout près de Rimbaud et Jean-Claude Izzo.
À présent, me voici tout près de la mer. Je vais prendre le temps d’approcher les coquillages, d’observer les oiseaux. De les nourrir. De parler aux arbres et de regarder les feuilles et les fleurs. Je ne négligerai pas la vie presque invisible des insectes. Chaque jour, je rendrai grâce au ciel et j’écrirai.