Le silence noir sur le chemin tournant

De Serge Marcel Roche, l’auteur de ce poème Le silence noir, je sais peu de choses sinon qu’il vit en Afrique centrale. Peu importe après tout. Ce qui compte, c’est la beauté brute et grave qui imprègne ses textes. C’est l’ancrage bouleversant de ses mots et de ses vers sur la terre d’Afrique. Continent oublié, sacrifié, abandonné souvent, après tant d’années de pillage et de colonisation, l’Afrique de Serge Marcel Roche marche debout. Droite et fière. Douloureuse et légère à la fois. Et puis il y a les oiseaux. Ces oiseaux magnifiés par toute la tendresse du poète. Je n’oublie pas non-plus qu’il a publié Génésie et Lignages, deux oeuvres disponibles en téléchargement sur son site Chemin tournant.  J’ignore dans quel pays vit Serge Marcel Roche mais je sais que c’est au bord d’un fleuve.

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Serge Marcel Roche se rencontre aussi sur Twitter @Chemintournant

Tours et détours chez Lucien Suel

Lire les poètes c’est l’un de mes dadas. À voix haute, j’adore. Apprends peu leurs textes par cœur – pardon Monsieur Hessel – mais m’y plonge souvent. Avec Lucien Suel, le plongeon est jubilatoire. Langue imagée, sonorités amusantes, rythme déroutant, propos teinté d’absurde et de mélancolie, humour à fleur de mots. Je suis fan. « Tours et détours » est un texte déniché sur le site de Lucien Suel, Silo. Je vous le recommande vivement. Vous y trouverez entre autres fantaisies et gourmandises surréalistes des poèmes express comme celui-ci

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Lorraine coeur d’acier 102 Mégaherz

Lorraine coeur d’acier, c’était la radio des gens de Longwy en lutte pour la sauvegarde de la sidérurgie. C’est ce formidable outil de parole, d’échanges et de combat que m’évoque le déplacement de François Hollande à Florange ce lundi. En 2012, alors qu’il était en campagne électorale, le futur président clamait son soutien aux salariés d’Arcelor-Mittal pour la sauvegarde des hauts fourneaux… fermés désormais. « L’histoire de Florange est l’histoire de la crise de la parole politique. De la confiance en la parole politique », souligne sur Mediapart Aurélie Filipetti, ancienne ministre et députée de Lorraine. Sur Lorraine coeur d’acier, radio libre, la parole n’était pas confisquée par les politiques. Chacun pouvait venir s’y exprimer. La radio vécut deux ans. De 1979 à 1980. Avant de disparaître. Comme les hauts fourneaux…

Il paraît que c’est le dégel

https://soundcloud.com/atiliodoreste/deshielo

Atilio Doreste est un artiste promeneur et photographe qui vit aux Îles Canaries. J’ignore où il a bien pu capturer ce son de dégel mais j’avoue que cette imersion auprès d’un tapis de glace fondante me fait rêver de la fin de l’hiver… alors qu’il ne s’est pas encore installé. Le travail minutieux et passionné de l’artiste espagnol se visite ici. Pour prolonger cette écoute, lire le très instructif billet de Syntone – le site dédié à l’actualité et à la critique de l’art radiophonique – intitulé sons inouis : sous les eaux et dans les glaciers.

Transoxiane, un roman fada

Fada. Fou en langage marseillais. Fada, proche de Dada, ce mouvement artistique et littéraire du début du XXème siècle dont j’aime tant l’esprit provocateur, mutin, extravagant et engagé. Transoxiane est une oeuvre numérique signée Guillaume Vissac et publiée il y a quelques jours par les Editions Walrus. Transoxiane est un roman fada dans le sens où il déroute le lecteur, l’envoie sur des pistes qui semblent n’avoir aucun lien, le plonge dans un univers à la fois bien réel et totalement surréaliste. Transoxiane – ici, la lecture des premières pages qui m’ont invité à suivre le chemin de Misère Balkaï – est une fiction poétique aux mots teintés de colère, de fièvre et parfois de désespoir comme d’absurde. J’en apprécie la couleur et je reste souvent le souffle coupé en avançant dans l’histoire. Bref, un vrai plaisir de lecture, à prolonger sur le blog de Guillaume Vissac, tout aussi fada je trouve : fuir est une pulsion.

Ça rape avec fougue à Beyrouth

Déniché ce reportage de Marine Vlahovic sur Arte Radio. Le titre m’a attiré. Le printemps du rap arabe. Sans doute parce que quand je lis printemps, je pense à changement, à révolution, à promesse, à renaissance. Sans doute aussi parce que j’écoute beaucoup IAM et Akhenaton. Samples choisis et travaillés. Paroles poétiques et engagées. Marseille universelle dans mon casque. Du coup, j’ai écouté et même si hélas je ne parle pas arabe, j’ai trouvé que la langue arabe collait bien elle aussi à la radicalité du rap. J’ai découvert un univers peu éloigné en fait de celui qui nourrit depuis longtemps maintenant les papes marseillais du hip hop. Pour prolonger cette découverte, je vous recommande l’écoute d’autres reportages de Marine Vlahovic publiés sur Arte Radio. Entre autres celui ramené de la forêt de Sivens, où Rémi Fraisse fut tué par une grenade offensive lancée par les gendarmes mobiles, à la fin du mois d’octobre.

Van Gogh le suicidé de la société

Prendre le temps de contempler à nouveau les reproductions de ces tableaux de Van Gogh qui fleurissent à rythme régulier sur Twitter. Se souvenir du sublime texte-hommage au peintre qu’écrivit Antonin Artaud en 1947, quelques mois avant sa mort. Tenter d’y donner souffle en en lisant quelques paragraphes à voix haute. Ceux du début. Se souvenir que l’écrivain est enterré au cimetière Saint-Pierre à Marseille. Me promettre d’aller le saluer très bientôt.

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Prolonger ma lecture par une promenade sur les articles que François Bon consacre à Antonin Artaud sur son site le tiers livre. Retourner à Van Gogh, que mon père me fit découvrir tout jeune parmi les peintres qu’il aimait me montrer. Rester béat devant ces amandiers en fleurs japonisants.

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Stabat Mater sous l’orage

Pas arrêté de pleuvoir ce lundi. À peine mis le nez dehors pour aller chercher le pain. Sinon, ai écouté la pluie taper sur les tuiles, retrouvé le Saleys bourdonnant et me suis passé et repassé le Stabat Mater sous l’orage du compositeur estonien Arvo Pärt. Je ne sais pourquoi j’ai songé à ce Fuji sous l’orage, précisément L’orage sous le sommet de la montagne, l’une des Trente-six vues du mont Fuji du grand maître Hokusai. Et puis j’ai fait une découverte, le Salve Regina du même Arvo Pärt.
[youtube https://www.youtube.com/watch?v=f1CNNf9iU9Y]

En écoutant ces merveilles, ai pensé qu’elles étaient un beau prolongement de mon billet sonore d’hier. Me suis dit aussi que Maman aurait aimé ces voix et cette musique posées au bord du monde et au pied du majestueux Fuji, la montagne sacrée de mes amis japonais.

Appuyé contre un mur de pierres sèches

Supplique aux morts (41)  est un texte signé Isabelle Parienté-Butterlin, écrivaine et professeur de philosophie, qui nourrit avec tant de profondeur et d’exigence son site Au bord des mondes. Ses Suppliques aux morts résonnent en moi avec vigueur. Elles expriment de si belle manière tout ce que j’aimerais tant pouvoir dire aux disparus. Isabelle trouve les mots, fait sonner les phrases comme j’aimerais tant pouvoir le faire. Poétiques, empreints de quiétude comme de souffrance assumée, ses textes me bouleversent. Les lire à voix haute me rapproche des disparus que je pleure, les proches, comme ceux dont je cultive le souvenir, entre autres les victimes des guerres.