De la trappe à la Toile, Là-bas si j’y suis annonce la couleur

Je n’ai pas manqué ce rendez-vous. Comme chaque abonné, j’imagine. De retour en chair et en sons sur la Toile après six mois passés à la cave, le nouveau Là-bas m’a fait plaisir tout en me laissant un peu inquiet. On commence par le plaisir. Le répondeur égal à lui-même. La Harley vrombissante. Daniel Mermet fidèle à Daniel Mermet. Gouleyant et percutant, quoique un tout petit peu en dedans par rapport à ses années micro. Peut-être un zeste d’émotion teintée de rage et de tristesse au moment de remonter sur scène ailleurs que dans ce qui fut si longtemps sa maison. Du Mermet de combat tout de même. Sans arrangements sur la ligne éditoriale qu’il emprunte et défend depuis 1989. Pluraliste – l’émission a longuement donné la parole aux militants de Riposte laïque et de Résistance républicaine – , aux antipodes du robinet d’eau tiède au parfum néo-libéral des bulletins d’info des média dominants, les radios comme les  télés. Ce fut donc hier-soir l’avant-première de l’émission modeste et géniale. Elle sera hebdomadaire dans un premier temps. Le temps justement de dénicher les 10.000 abonnés qui manquent pour que le fameux 7-9 neuf que Mermet nous avait annoncé pour ce début 2015 voit le jour. Et c’est ici que je veux parler de mon inquiétude. Combien de temps faudra-t-il au nouveau Là-bas pour mobiliser tous les nouveaux abonnés dont il a besoin ? Un, deux, trois, six, douze mois ? Allez, pour tenter de convaincre les encore réticents à placer quelques dizaines d’euros sur l’émission « plus près des jetables que des notables », voici le reportage d’Anaëlle Verzaux auprès des Musulmans de la mosquée Islah de Montreuil – réalisé le jour de la tuerie de la Porte de Vincennes – et diffusé hier-soir sur le site de Là-bas.

Pour info, Là-bas est suivi par 36.318 « amis » sur Facebook. Sur Twitter, @LabasOfficiel et @MermetDaniel gagneraient à être un tantinet plus réactifs et à l’écoute de leurs 1.814 followers. Je dis ça, je dis rien…

 

Dans le Petit Monde de Nicolas Esse

Regarder les nuages qui passent avant d’aller mourir. Il a suffi de cette invitation juste en dessous du titre de son site – Le Petit Monde de Nicolas Esse – pour que je me laisse séduire. Ce quinqua né en Suisse ne manque ni d’humour, ni de poésie, ni d’un sens aigu du tragique. Il se définit comme lecteur précoce et compulsif. Ralenti par le besoin de dessiner dans les marges, ajoute-t-il en déroulant sa bio. Ça tombe bien. Les marges m’attirent depuis l’enfance. Les ai longtemps préférées aux pleines pages. Elles me troublent et me captivent souvent. Et puis dessiner avec des mots est un plaisir que je partage avec cet auteur dont j’ai découvert il y a quelques semaines la savoureuse série Épitaphes Utiles pour ne pas être pris de cours en cas de mort imprévue. Épilation du langage, le texte lu ici, met du rythme et de la pensée sur ce que nous sommes sans doute quelques uns à déplorer : l’affadissement des mots, la paresse intellectuelle, la fausse pudeur de la parole, les raccourcis faciles, la récurrente et affligeante mollesse de l’expression individuelle et médiatique. Du coup, je me laisserai bien tenter un de ces quatre par la lecture à voix haute – et jubilatoire à coup sûr – de quelques uns de ses billets publiés par exemple dans la catégorie Vu sous la jupe des étoiles, Gialloverde ou Ze English Coin. Au fait, l’entrée dans Le Petit Monde de Nicolas Esse c’est par ici.

Ce chien s’appelle Adolf

Je dois être perturbé depuis quelques jours. Je ne l’ai pas dit à mes enfants qui m’accompagnaient lors de la promenade hier après-midi. Les aboiements prolongés de ce chien, très énervé dans le jardin de ses maîtres en contrebas, m’ont renvoyé aux éructations d’Adolf Hitler, notamment lors de son tout premier discours comme Chancelier du Reich, le 10 février 1933. Ce chien nous a un peu fait peur, mais bon… J’ai beau savoir que l’Histoire ne se répète jamais, je redoute le retour en force des tenants de l’inhumanité. Et pas seulement à l’occasion d’attentats. Je ne crains pas les fascistes mais j’aimerais bien que nous puissions durablement nous promener en paix, ensemble, sur les chemins de notre choix, où enfin les chiens en tous genres cesseraient de faire peur aux enfants. Comme aux grands. Et puis, dites-moi, les mots de ce discours, ça ne vous évoque rien qui pourrait ressembler à l’actualité ?…

« … et maintenant les rangs des chômeurs commencent à enfler.Un, deux, trois millions, quatre millions, cinq millions, six millions, sept millions, aujourd’hui c’est peut-être sept ou huit millions… Pour combien de temps encore ? C’est pourquoi je suis aujourd’hui convaincu qu’il nous faut agir maintenant avant qu’il ne soir trop tard. Par conséquent, j’ai décidé, le 30 janvier, avec le soutien de mon parti qui commença avec sept militants et qui est à ce jour fort de douze millions de membres, de sauver la nation et la mère-patrie… « 

En direct-live sous la couette

https://soundcloud.com/hand-made-radio/sous-la-couette

Bigrement créative cette radio cousue main. En plus, avant-hier soir, elle nous parlait d’amour sous la couette. Un seul micro pour Sébastien, Elisabeth, Estelle, Hélène, Bruno, Violaine, Chloé, Stéphane, Roselyne, Laura et Sabrina. Pas d’effets, pas de montage, tout en direct. Une vraie grande performance. La radio sous la couette est la première émission de l’année produite par ces passionnés de radio qui annoncent la couleur  : « Imaginons que nous revenions aux premiers temps de la radio. Imaginons une pièce sonore, une composition bruitiste, une pièce radiophonique, un documentaire sonore où tous les sons seraient uniquement produits par la voix humaine. » Performance joyeuse. Jeu de voix subtil. Poésie à fleur de peau. Humour délicat. De la pure régalade. Prochaine émission, le 12 février prochain de 21H15 à 21H15 sur Radio Campus Paris 93.9.

 

François Bon, l’homme qui parle littérature aux ronds-points

La littérature se crie dans les ronds-points, c’est l’aventure singulière menée depuis la mi-septembre par François Bon, parallèlement à son tour de Tours en 80 ronds-points. Inédit voyage sur, dans, autour, depuis les ronds-points de cette ville à laquelle François Bon consacrait en 2006 une série Tours capitale des ronds-points d’art. Passionnante aventure parce que s’y mêlent entre autres littérature, urbanisme, politique, mémoire et performance d’acteur. La philosophie et le protocole de ce projet ronds-points sont exposés ici.

Je ne connais pas Tours. J’ignore sa géographie, son histoire, je n’ai jamais lu que la moitié des auteurs criés, joués, vécus par François Bon. Et encore. N’empêche, je suis captivé par la visite inédite qu’il en propose et par la découverte des autres. Fasciné par ce périple puissant et amoureux de celui qui sur son tierslivre sait m’emmener auprès d’Edgar Poe, de Rabelais et de Rimbaud. La littérature est partout chez elle. Jusqu’au ras du bitume. Elle éclaire. Elle se vit avec le corps. François Bon lui donne aussi une voix qui enchante le tumulte du monde.

Dessine-moi un dessinateur…

Dessinateur, un métier à risques… j’ai retrouvé sur Arte Radio cette éloquente séquence datée de février 2006. Un écho ironique à l’affaire des caricatures de Mahomet publiées par Charlie-Hebdo. Un message de solidarité accompagné de ces mots de commentaire : L’humour, l’ironie, la satire, la parodie, la critique, l’outrance, le rire et la liberté d’expression sont parmi les plus belles conquêtes de l’humanité. Plus que jamais d’actualité cette création sonore, alors que le numéro des survivants de Charlie Hebdo sort ce mercredi, une semaine jour pour jour après l’assassinat de Cabu, Charb, Honoré, Tignous, Wolinski et leurs compagnons de liberté. C’est Mahomet agité par le remords… et dessiné par Luz* qui fait la couv’ de Charlie. Aujourd’hui, le Canard Enchaîné y va lui aussi de sa Une grinçante, en hommage à ses amis de Charlie Hebdo assassinés.

* Pour prolonger, lire et écouter Luz sur le site de Libération.

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La Supplique aux Morts d’Isabelle Parienté-Butterlin

Il est des auteurs dont j’aurais aimé écrire les textes*. Isabelle Parienté-Butterlin est de ceux-là. Accorder mots justes et pensée profonde, qui touchent à cette douloureuse humanité que nous avons en partage, tel est son souffle et son talent. Résonne aussi en moi le son que recèlent ses phrases. Ce tempo. Ce rythme bouleversant. Ces silences. Lire ses textes à voix haute me réconforte. Me maintient debout. M’empêche de laisser la nuit du monde s’introduire en moi. Pour prolonger cette écoute, son site au bord des mondes vous attend ici.

*Je pense à Anna Jouy, François Bon, Serge Marcel Roche, là tout de suite