Pauvres fantômes

Sonatine

Je les avais pourtant prévenus le clavecin est piégé n’y touchez pas mais si têtus ils sont les fantômes surtout lorsque leur désir de revanche sur les riches leur mange le cœur ils ne m’ont pas écouté les ai vus entrer dans le salon désert sentait l’amour le parfum de femme et le tabac hollandais leurs éclats de rire obscènes me claquent encore aux oreilles suis resté dehors en embuscade ai aperçu le plus vieux s’approcher de l’instrument avec une hache à la main il ne l’a pas actionnée non il a regardé ses deux acolytes en tirant la langue et au ralenti a avancé son poing vers le blanc des touches déplié ses doigts puis tenté une note avec son index et là le clavecin a craché des torrents de cailloux de poussière un tourbillon géant a pris d’assaut l’espace et les fantômes ont disparu sous les gravats dans un silence de mort.

Photo de ci-haut @RomainVeillon

Traversée

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Traverser la campagne givrée
train presque fantôme
juste le crissement des freins
et le claquement des rails
pour déchirer le silence du petit matin
avancer
rentrer
retourner
yeux fermés
souffle presque fantôme
juste la danse légère du sang
sous la peau fatiguée
puis
presque par surprise
se retrouver en pleine lumière
et prier
prier encore
à la mort des fantômes

Foudroyés

Fantôme

Une plaie ouverte à la face du monde
tant de fantômes réincarnés
tant de baisers profonds mêlés
foudroyés par la grâce
terrassés par la crasse
menacés par l’oubli
mais
ils nous survivront