Parfois
quand les mots humains manquent
je m’échappe aux côtés des animaux
je tends l’oreille
à bonne distance
et je retrouve le tempo de l’enfance
manque
Lui
Cette blessure à vif
cette trace foncée à fleur d’écorce
raconte un manque d’ailes ou un amour
les deux peut-être
l’arrêt brutal de la lame
signe le remords ou la mort
sans tracer le t final
qui aurait sorti de l’obscurité
la main accrochée au canif
lui
aurait pu aussi se nicher
à côté d’elle
dans pluie
la main n’aurait pas tremblé
légère
pour dessiner les lettres absentes
p
e
juste à côté de la tache noire
gravée telle une larme oblongue
et cette croix griffonnée à la hâte
comme on se signe paupières closes
lorsque le tattoo saigne
lorsque le couperet claque
sur la peau et les os
lorsque le silence n’a plus de lettres
pour dire le définitif
je sais qu’à travers les rameaux s’envole
le cri sourd des arbres blessés
mêlé aux voix des trépassés
offertes pour consoler
Manquer
En manque de désir d’écrire fus longtemps
en panne de mots,
flux à l’arrêt, tu sais
– Man, que me dis ?
Oui, dénué de sons et de couleurs, à court de souffle
tout vide, en cale sèche
du coup, resté à quai, clavier grippé, écran muet
rendez-vous des carnets séché
Jusqu’à ce lever de matin doré de janvier
sang en accéléré
feu relancé
Neuf mois jour pour jour après, passage à l’acte désiré
Cette éclipse, de peu manqué la prolonger
pas loin de louper encore le train d’écriture
wagon vide, gares désertes, tant de voies sans issues
jusqu’à ce frémissement de voix jailli de dedans l’obscurité
À quelques battements de cœur près, nous nous serions encore manqués, qui sait ?
Tenter, s’il te plait, oser.