Rosa et Angelo

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J’ai bien connu Angelo
grandi au village lui aussi
dans la dernière maison avant la falaise
posée au bout d’un chemin avec vue sur la mer
murs épais comme des chênes millénaires
toit fragile de tuiles maigres
le regard bleu pâle il avait
perçait jusqu’au creux de mon âme et de mon ventre
le jour de rares oiseaux se hasardaient sur les étendoirs
Angelo leur parlait en les peignant
les guettait et imitait leur chant
la nuit entendions le canon
la grande guerre nous laissait transis
mais lui non
encore trop jeune pour partir
la peur rodait
lui ne tremblait pas
il souriait et continuait de peindre
des aquarelles d’abord
les personnages naissaient dans un drapé d’eau et de pigment
les toiles devenaient de plus en plus hautes au fil des mois
se juchait sur un tabouret
jamais le vertige
je l’accompagnais en silence dans son atelier
Rosa tu es si belle il me disait
mes yeux s’embuaient à chaque fois
le dimanche je posais nue pour lui
je grelottais
il me caressait des yeux
ne me touchait pas
il n’osait pas je crois
me donnait un baiser sur les cils en fin de séance
se serrait contre moi à la messe
je nous entendais respirer plus fort
l’hostie avalée il se signait
ne me quittait pas des yeux
repartait à reculons vers les maisons de riches où l’attendaient ses chantiers
ne me les montrait jamais
me disait le bonheur de donner vie à des anges
me racontait les arbres et les oiseaux
me nommait les couleurs
un jour il a fini par partir à la guerre
je ne l’ai plus jamais revu
la paix revenue mon père m’a marié à un vieux marquis
m’a cloitrée dans une immense villa en bord de falaise
aux murs décorés de larges fresques
au sommet du ciel j’ai deviné un A caché derrière un nuage bistre
il y a quelques secondes j’ai entendu la voix d’Angelo remonter de la mer
je me suis approchée de la fenêtre sans volets
happée par la lumière blanche je me suis envolée le rejoindre parmi les anges du ciel .

Cette photo, L’ultimo imperatore est signée Romain Veillon.

Un plongeon géant chez Katsushika Hokusai, peintre éternel

Plus de deux heures trente d’attente pour toucher des yeux une merveille absolue, l’exposition Hokusai, l’immense peintre japonais. Magie, délicatesse, sensualité, universalité. Les mots manquent pour décrire ce que j’ai ressenti en approchant les oeuvres de celui qui rêvait de vivre jusqu’à 110 ans pour prolonger sa folie du dessin. En tout, plus de 500 pièces exceptionnelles sont exposées au Grand Palais à Paris. Une grande partie de ces oeuvres n’ont encore jamais été présentées hors du Japon. J’ai été saisi d’une douce émotion face aux estampes d’oiseaux, de fleurs, de femmes, et celles de la série Les 36 vues du Mont Fuji, entre autres devant les myhiques Sous la grande vague au large de la côte à Kanagawa et Vent du sud Ciel clair. Ai trouvé sublime la série Voyage au fil des Cascades des différentes provinces. Découvrir en vrai Katsushika Hokusai est un voyage vers le Japon éternel et universel qui incite au recueillement et au chuchotement.

Hokusai chroniqueur de son époque. Hokusai maître du manga. Hokusai amoureux des oiseaux. Hokusai adorateur du Mont Fuji et de la mer. Hokusai dessinateur hors normes. Hokusai quitté à regret lorsque s’est rapprochée l’heure de reprendre le train vers le sud… Peut-être tenterai-je un nouveau plongeon dans son monde merveilleux d’ici au 18 janvier, date de clôture de l’exposition.

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Dispute d’enfants chinois autour d’une partie de go
1787-1793

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Sifflet de la cerise d’hiver
1801-1804

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Dragon volant au dessus du mont Fuji 1849
Pour prolonger le plaisir, Hokusai se visite aussi sur Arte.

Sacha Guitry raconte Auguste Renoir

RenoirJ’ai découvert ce matin grâce à Didier Beaujardin, l’un de mes amis numériques, qu’il y a 94 ans jour pour jour – le 3 décembre 1919 – disparaissait Auguste Renoir, l’immense peintre impressionniste. Je n’oublie pas que Renoir fait partie des nombreux artistes dont mon Papa me fit découvrir les oeuvres lorsque j’étais enfant : Van Gogh, Monet, Manet, Modigliani, Soutine et donc Renoir notamment. A la maison, les livres d’art ne manquaient pas. Nous les ouvrions souvent ensemble le dimanche. C’était un émerveillement. Aujourd’hui, pour accompagner en sons ce souvenir, voici un document signé Sacha Guitry, qui au début du XXème siècle filma avec une caméra amateur les grands artistes qui rendaient visite à son père. C’est une spéciale dédicace à Didier Beaujardin et à mon Papa.

Sacha Guitry évoque Renoir, en images

A la rencontre d’Auguste Renoir

Auguste Renoir a franchi toutes les frontières. Le voici raconté en espagnol.