Shanghai est un glaneur de planches

glaneur

Toute la sainte journée à tourner en tricycle électrique sur les chantiers dénicher des planches usées inutilisables cassées des planchettes aussi des cloisons brisées des vestiges de parois qui séparaient qui dans les maisons qui isolaient qui de qui peut-être des enfants et des parents dormaient de chaque côté des grands-parents aussi qui sait ces planches procuraient à chacun un semblant d’intimité et aujourd’hui ils vivent où ces gens nombreux sont obligés de s’en aller on leur demande un beau jour de quitter leur logement sans traîner car ça construit à tour de bras ici des immeubles immenses avec bureaux des centres commerciaux aussi et pour construire d’abord il faut démolir les vieux lotissements en traversant certains quartiers il reste des montagnes de poussière et de gravats entassés tant et tant de planches à glaner puis à entasser le plus haut possible juste derrière le siège du tricycle comme une pyramide elles débordent sur les côtés elles sont ficelées à la six quatre deux tu te demandes comment elles ne s’écroulent pas lorsque le glaneur démarre son engin là il est électrique mais parfois tu en as vu sillonner la ville sans moteur le glaneur debout sur ses pédales rouillées appuyait comme au ralenti tellement c’était lourd parfois c’était une glaneuse ça grinçait là ça grince un peu aussi en freinant juste à l’entrée de la décharge comment il a fait pour freiner tu ne sais tu suis à vélo la cargaison sur un chemin plein de nids de poule et de boue d’abord la pesée à plein puis un copain aide à décharger en lançant les planches sur un tas qui grimpe elles claquent tu te demandes si elles passeront l’automne pluvieux si un jour cet hiver elles pourront encore réchauffer des hommes des femmes des enfants dans des maisons tant elles vont boire de pluie ces planches et lorsqu’il n’en reste aucune retour à la pesée à vide puis passer à la caisse et tendre la main à la dame qui tient les comptes son mari au tee-shirt violet te glisse quatre billets rouges de dix yuans en tout ça fait six euros pas plus dans la poche du jeune glaneur il repart la cigarette à l’oreille et en silence vers d’autres chantiers ce soir et demain encore il ne se couchera pas avec la faim.

Une réflexion sur “Shanghai est un glaneur de planches

  1. Belle écriture
    comment va la vie aves les siens, les enfants les grands et petits,
    les sentiments du papet de shanghai?

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