Tu tournes et vires au creux des draps
bordé de la nuit noire profonde muette
deux trois heures t’es assoupi pas plus
la pluie dehors le toc toc toc des gouttes sur la terrasse
pendant quelques secondes tu t’es demandé sur quel point du globe tu tournais
froide pluie arbres transis lueurs or à travers les ramures
as tenté de convoquer le noir au creux des paupières
en vain
alors puisqu’enfin t’es souvenu qu’ici la vie s’écrit autrement t’est apparu hésitant vivant démuni et délicat
le caractère 雨 avec son ciel au-dessus d’un nuage ouvert et ses quatre gouttes
la pluie yü
l’as écrit et réécrit sur ton cahier vert
doucement comme à l’école puis es retourné t’envelopper de noir et rêver aux miracles de la nuit.
Auteur : ericsons
Shanghai est un cahier d’écriture
Le cahier vert t’attendait patient bien au chaud dans ton sac à dos de voyageur curieux
il savait les mots déjà écrits et laissés en repos
il les avait oubliés un peu comme pour offrir plus tard lorsque le désir rejaillirait la joie de la redécouverte
cadeau silencieux et précieux
les pages quadrillées attendaient tes mains et tes yeux émerveillés
tu te souviens tu nommes à nouveau tu hésites aussi et parfois ta mémoire te fait défaut
tu acceptes ton immense petitesse face à la masse des mots
puis tu te remets à faire danser le crayon sur le papier et oses sans tarder orner le silence de ces sons et de ces tons
en confiance
à présent certains mots te sourient comme jadis ils réapparaissent paisibles depuis les cachettes où ta mémoire les avait déposés
tu en découvres de nouveaux et tu mesures l’immense chance de nommer le monde autrement.
Shanghai est un pont blanc
Le grand pont peint de blanc se dresse sur ta route rouges les caractères percent la brume froide marquent le chemin vers le cœur de Shanghai creusent le sillon vers l’ouest tandis que le Bouddha rit de tout son or
tu voudrais nommer ce pont cette voie vers ceux qui t’attendent beaux de tout leur amour mais tu ne sais dire que pont blanc limité car ignorant de presque tout
il te faudra retourner à l’étude retrouver la voie claire de l’encre trait par trait point par point réapprendre à nommer les choses et les êtres du monde à voix haute pas à pas et sentir battre ton sang chaque fois que tu entends sonner cette langue chuinter siffler vibrer glisser en douceur et en vigueur dans l’espace offert rues maisons parcs jardins
il te faudra redécouvrir la joie à peine tue des mots prononcés pour dire la pluie qui tombe le grand pays les gens gentils et puis compter jusqu’à dix psalmodie comptine comme l’enfant que jamais n’as cessé d’être étonné devant la beauté du monde et ses mystères
tu tenteras d’oublier sa misère sa violence sa laideur ne plus se souvenir des barbares tu gommeras leurs traces sur la feuille tu choisiras de cheminer ailleurs tu l’écriras sans te retourner trait par trait point par point
tu te transformeras en gouttes de pluie une à une tu chuteras sur l’herbe du jardin et verras se dresser le rouge écrit au-dessus de la route sur le pont majuscule blanc et géant comme un bras lancé vers toi pour t’accueillir.
Simone et ses doudous
J’ai aperçu Simone assise sur un banc du Quai du port, à deux pas de la mairie, assoupie au soleil de janvier, face aux bateaux et à la Bonne Mère, tout là-haut. Je n’ai pas voulu la déranger mais lorsque je me suis approché, elle s’est réveillée et nous avons un peu bavardé. Le regard perdu vers le sol, Simone m’a raconté ses après-midis.
Elle vient se poser ici chaque jour lorsqu’il ne pleut pas. À ses côtés, elle installe les doudous qu’elle tricote chez elle, dans le meublé qu’elle loue près de la Canebière. Simone aime les animaux. Elle tricote des doudous-chat, des doudous-chien, des doudous-serpent, des doudous-poupée aussi. Dix euros chacun elle les vend. Pour acheter sa laine, quelques légumes et quelques fruits.
Veuve depuis plus de vingt ans, sans enfant, Simone touche 602 euros de retraite et paye 520 euros de loyer chaque mois. Son propriétaire est gentil. Il lui permet de payer en plusieurs fois.
En ce moment, elle resterait volontiers dans son meublé car il fait froid sur Marseille. Mais elle se force un peu, même si elle sait que la recette sera maigre. À 85 ans, Simone attend un nouveau printemps avec impatience. Les après-midis sont plus longues, il fait plus chaud, et les promeneurs sont plus nombreux sur le Vieux-Port. Plus généreux aussi.
Les teintes du silence
Renoncer au silence
à peine quelques poignées de secondes
avancer à petits pas dans la couche fraîche
comme l’enfant que fus
écouter la neige crisser puis se taire
point de merle pour colorier le jour
un violon s’échappe d’une fenêtre close
par les grilles entrouvertes passent les rires et les souvenirs
jardins enfouis
fleurs ensevelies
pas égarés
chuchotements perdus
et bientôt
parce que rien ne dure jamais
le retour de la pluie sur les toits
la féérie évanouie
puis le retour aux teintes du silence.
L’au-revoir
Au-revoir
au-revoir
l’avouer
l’ire erre
la virer
rouler la roue
voir le rio
avoir le rare
relier le lierre
la vie ravie
la vraie
lalala
lalalaire
Le feuillleton Jean-Michel l’organiste autodidacte #3 « je ne sais pas, je cherche »
Jean-Michel ne se voit pas les dimanches à la messe il s’entend
ou plutôt son jeu s’entend mêlé aux paroles et prières
il est l’organiste remplaçant de la paroisse
lorsque le curé a besoin de lui il arrive se met à son instrument et joue tout là-haut
parfois Jean-Michel vient maintenir en souffle de vie l’orgue de l’autre église de la commune
c’est là que je l’ai accompagné
admiratif de cet homme cent pour cent autodidacte
une matinée musicale façon feuilleton audio en trois épisodes
Les trois épisodes
J’ai filmé Jean-Michel à son orgue
intimidé il fut mais pas inhibé
Jean-Michel est aussi un amoureux des perroquets
Le feuilleton Jean-Michel l’organiste autodidacte #2 « je demande pardon à Bach »
Jean-Michel ne se voit pas les dimanches à la messe il s’entend
ou plutôt son jeu s’entend mêlé aux paroles et prières
il est l’organiste remplaçant de la paroisse
lorsque le curé a besoin de lui il arrive se met à son instrument et joue tout là-haut
parfois Jean-Michel vient maintenir en souffle de vie l’orgue de l’autre église de la commune
c’est là que je l’ai accompagné
admiratif de cet homme cent pour cent autodidacte
une matinée musicale façon feuilleton audio en trois épisodes
L’épisode #1 « j’ai avancé à ma façon »
Demain l’épisode #3 « je ne sais pas, je cherche »
La lune
Lune
Lune
lue
nulle aune
anne la nana nue
annula lulu le neuneu
Écorce
Écorce
écorce
ce roc
ce croc
ce cor
crée or
coco