Migrateur
migrateur
trime
gare
la ruelle
tuera
le rat git
la truite rame
le tigre mugit
la grue tire et le rate
lutte
ma mie
trie la lie
grime
et remue la lame
Récits, nouvelles et autres curiosités
Peupliers si peu épuisés
Qu’es bòn !
Sur les murs de ma ville cette femme nous regarde venue de loin arrivée ici comme tant d’autres depuis tant de siècles derrière sa photo des journaux en chinois comme un habit de lumière au carrefour des continents un jour un portrait #OneDayOnePortrait ne sait qui a signé cet hommage discret à toutes celles et tous ceux venu.e.s d’ailleurs pour vivre à Marseille hommage à la fraternité joie dedans à chacun de mes pas et plaisir de fredonner l’une des chansons de Moussu T e lei Jovents qui chaque jour m’accompagnent où que je marche où que je respire où que je tâche de ne point désespérer
Qu’es bòn !
Nos farien creire que viure ensems es una ideia de calut,
Nos farien creire que sensa mestre seriam perdut,
Nos farien creire que tot pòu estre crompat o vendut,
Nos farien creire qu’es totjorn lo copable qu’es abatut.
Ils nous feraient croire que vivre ensemble est une idée de fou
Ils nous feraient croire que sans maître, nous serions perdus,
Ils nous feraient croire que tout peut être acheté ou vendu,
Ils nous feraient croire que c’est toujours le coupable qui est abattu
O fan
Qu’es bòn
De relevar la testa!
Qu’es bòn
De si sentir vivent!
Qu’es bòn
De rintrar dins la festa!
Qu’es bòn oie qu’es bòn!
Que c’est bon
de relever la tête !
De se sentir vivant !
De rentrer dans la fête !
Que c’est bon !
Nos farien veire dei montanhas d’aur per nos atisar,
Nos farien veire dei dieus poderos per davant si clinar,
Nos farien veire dei gròs saberuts per mai nos embarcar,
Nos farien veire d’imatges verinosa per nos enganar.
Ils nous feraient voir des montagnes d’or pour nous attirer
Ils nous feraient voir des dieux puissants pour s’incliner devant
Ils nous feraient voir des grands savants pour mieux nous arnaquer
Ils nous feraient voir des images venimeuses pour nous tromper.
Qu’es bòn
De relevar la testa!
Qu’es bòn
De si sentir vivent!
Qu’es bòn
De rintrar dins la festa!
Qu’es bòn oie qu’es bòn!
Nos farien viure un monde d’enveja e de prohibicion,
Nos farien viure empegat au pecat, a la supersticion,
Nos farien viure segon la borsa e seis evolucions,
Nos farien viure dins un astre malaut, poirit de polucion.
Ils nous feraient vivre un monde d’envie et de prohibition
Ils nous feraient vivre collés au pêché, à la superstition
Ils nous feraient vivre selon la bourse et ses évolutions,
Ils nous feraient vivre dans un astre malade, pourri de pollution.
Qu’es bòn
De relevar la testa!
Qu’es bòn
De si sentir vivent!
Qu’es bòn
De rintrar dins la festa!
Qu’es bòn oie qu’es bòn!
Un thé à la menthe sans frontières
Quitter le métro station Noailles et juste à la sortie face au marché des Capucins tomber sur cette affiche les frontières tuent oui là-haut dans les Alpes tout près de nous imaginer le calvaire de ces jeunes migrants africains raconté ici être fier de la solidarité des gens de montagne guidés au quotidien par ce que leur dicte leur conscience leurs valeurs leurs principes souvent dans la crainte des gendarmes
ensuite descendre vers le Vieux-Port là où tout a commencé pour notre Marseille là où ses fondateurs phocéens choisirent de se poser après des jours et des jours de mer les mêmes qui pour construire la ville puisèrent dans l’antique carrière de la Corderie aujourd’hui dévastée endeuillée
puis aller saluer le clocher de l’Église des Accoules au pied de ce quartier du Panier où je passai les deux premières années de ma vie elle au moins personne ne va la menacer personne ne projette de la couper en morceaux pour vendre le terrain à un promoteur enfin mèfi quand-même Marseille regorge parfois de mauvaises surprises poursuivre la balade à travers les lieux familiers et m’asseoir devant un thé à la menthe dans ce café où je me plais à écouter les gens parler arabe
ne rien comprendre à ce qu’ils disent mais pas grave au contraire en capter les sons savourer les intonations deviner les humeurs les émotions de celles et ceux qui échangent ici en paix devant la même boisson que moi Marseillais comme moi frères et sœurs de la même cité qui n’en finit pas d’être blessée humiliée et de tenter de panser ses plaies comme elle peut
avant de m’en repartir une petite faim m’arrêter chez Charly où la pizza est une maxi-régalade me souvenir des mots de Jean-Claude Izzo sur le bonheur .
Du désastre de la Corderie aux mots de Marsiho
Le désastre vécu par l’antique carrière de la Corderie a fait surgir en moi un désir de vengeance pour qu’à jamais les coupables de ce crime contre le patrimoine de Marseille soient expédiés dans les décombres de l’Histoire surgi aussi un rêve de grand tremblement qui ressuscite le site pour que tous ensemble nous puissions repartir pour 2600 ans de mémoire vive vite m’efforcer de chasser cette pulsion vilaine la rayer de ma tête et de mes tripes car le sang et la haine ne lavent jamais aucun forfait je le sais bien chasser ce cauchemar funeste et tenter de me tourner vers le beau vers les mots qui eux enterrent la saloperie du monde et le sauvent ils le peuvent oui ils le peuvent désir profond ici au cœur de notre cité de retrouver l’un de ses fils les plus inspirés les plus poètes l’écrivain André Suarès auteur du formidable Marsiho savourer chaque phrase de ce bijou et lire un extrait à voix haute où trois mots sonnent en écho au désastre meurtre lâcheté et soleil…
« … Sous le ciel d’azur, rire éclatant, il y a dix coins marqués pour le meurtre. Ce sont des places régulières, des trapèzes biscornus qui s’espacent au soleil entre deux ou trois pâtés de grosses maisons. Terrains vagues, lieux de démolitions, ils semblent piqués de décombres, jalonnés pour le crime et lotis au guet-apens. Les pavots du sang doivent pousser sur ces champs arides : ils attendent la saison.
Que le ciel est heureux qui les illumine, qu’il laisse tomber de haut le miel de la lumière sur ces dartres galeuses de la peau d’une ville ! Rien ne ressemble moins au coupe-gorges des ruelles sinistres, dans les vieilles cités à l’ombre des cathédrales. Ici, tout se fait en plein soleil. Quelle merveille dans une ville où comme partout, le style moderne commande l’hypocrisie et la lâcheté.
Au beau milieu de la cité, dans le centre de la ruche, là où grouille la foule, les carrefours prédestinés haussent une large épaule, étirent leurs membres de plâtre gris, et dressent leurs bosses de terre battue. Tantôt plus couverte de gens qu’une charogne de vermine et tantôt déserte comme un cimetière à minuit, la place est un champ clos.
J’en sais une, les lignes courbes, la rue qui fuit, les ruelles qui s’amorcent en serpents et en scorpions, mes murs aveugles d’une part, des murailles trouées en écumoire, de l’autre, tout y appelle le meurtre… »
Copyright @ Editions Jeanne Laffite
Colère, tristesse et honte
Comment taire ma colère quand à Marseille brise-roche et tracto-pelles dévastent des vestiges grecs vieux de vingt-six siècles ça se passe dans le quartier de ma jeunesse sur le site de l’antique carrière de la Corderie où les Phocéens fondateurs de la cité venaient s’approvisionner pour construire Massalia
ce carnage patrimonial me révolte tout autant qu’il m’attriste 2600 ans d’histoire démolis pour laisser Vinci construire un immeuble de cent-neuf logements de standing avec la bénédiction du Président de la République de la Ministre de la Culture et du Maire de Marseille que la honte les inonde !
Détruire une carrière antique pour construire des logements haut standing : c’est aujourd’hui et ça se passe à Marseille. pic.twitter.com/zwwYYq3r7w
— AJ+ français (@ajplusfrancais) 11 décembre 2017
#Corderie Rudy Ricciotti : « Je suis d’une très très grande tristesse. Comment Marseille a pu tomber si bas ? Des années de Gaudinisme ont fabriqué cette mémoire passive, avachie, effrayée, docile. » pic.twitter.com/uiBqQgYvtE
— David Coquille (@DavidLaMars) 11 décembre 2017
#Corderie Réaction d’Alexandre Gady, président de @SPPEF et prof d’histoire de l’art à la Sorbonne : « Je suis bouleversé. On est lâchés par tout le monde. La seule arme qui nous reste, ce sont les photos du crime à diffuser. » #Marseille pic.twitter.com/zrc9av3Pr8
— David Coquille (@DavidLaMars) 11 décembre 2017
Vite, Mme la ministre @FrancoiseNyssen! …2600 ans d’histoire sont mangés depuis hier par les tractopelles de @VINCI_fr car une femme, qui se fait passer pour vous leur, en a donné le droit https://t.co/Jn4vWQRvwE
— Nicole Ferroni (@NicoleFerroniZe) 13 décembre 2017
Photo de ci-haut @DavidCoquille
Tant mieux pour les poissons
Sous le vent déchaîné
le sémaphore se tait
il laisse la mer parler
ni brigands ni contrebandiers
à guetter de là-haut
comme au bon vieux temps
en secret les gabians
observent apaisés
les rochers débarrassés
des pêcheurs à la ligne
tant mieux pour les poissons.
Callelongue dans la présence d’Izzo
Chaque fois que mes pas me mènent ici en ce bout du monde marseillais je sais je sens que Jean-Claude Izzo m’accompagne pareil hier sous les embruns et les bourrasques de ce vent d’est furieux Callelongue et ses cabanons trempés sa roche blanche indondée teintée de beige par la pluie son sémaphore tendu vers le ciel gorgé de gris face aux îles Maïre et Tiboulen de Maïre secouées de vagues et d’écume Jean-Claude Izzo tremble à mes côtés devant ce Marseille grandiose terrible et cette Méditerranée où tant d’humains de migrants de marins continuent de se perdre
Je me souviens qu’il y a plus de deux ans et demi je m’étais installé au rond-point de Callelongue pour lire à voix haute un texte de Jean-Claude Izzo
Mon billet de blog du 1er avril 2015 c’est par ici.
Si j’étais un oiseau
[vimeo 241007433 w=640 h=360]
Déniché cette merveille hier sur Twitter
Murmuraciones o el arte del vuelo: dos poéticos vídeos de estorninos https://t.co/vJi00MHlK8 pic.twitter.com/z0PJ4gPrqJ
— Cultura Inquieta (@culturainquieta) 10 décembre 2017
https://platform.twitter.com/widgets.js
Ces murmurations des étourneaux m’ont captivé un long moment me suis repassé en boucle ces images tournées par la cinéaste Jan Van Ijken puis ai écrit ces menus vers histoire de rester le plus léger possible pour qui sait apprendre un jour à m’envoler moi aussi
Si j’étais un oiseau
serais un étourneau
je danserais là-haut
avec tous mes potos
il ne ferait pas chaud
mais juste ce qu’il faut
nous partirions très tôt
entourés de bravos
comme un joli cadeau
offert par les badauds
Photo de ci-haut @CulturaInquieta
Le feuilleton Maïté monte aux vaches #7 « La France, elle est pas très accueillante malgré ce qu’elle dit »
Grande Grassouillette Sauvage et Trompe-la-mort
ce sont les vaches de Maïté
factrice à la retraite elle monte s’en occuper tous les jours
sur la ferme paternelle trois granges et des pâturages à volonté
y vivent aussi des chats des poules et des canards
ai accompagné Maïté là-haut un après-midi auprès de ses Blondes d’Aquitaine
voulais toucher du doigt et des oreilles à quoi pouvait donc ressembler cette passion pour les vaches qu’elle avait avouée ici il y a deux semaines
un après-midi à la ferme façon feuilleton audio en sept épisodes.
L’épisode #6 « Ce qu’on fait aux animaux, un jour ou l’autre on le fait aux humains »
Le feuilleton complet