Les lutteurs sénégalais sur le sable

Sur la plage de Mbour, ils sont parfois une trentaine à venir s’entraîner le soir à la fraîche, pour prépérer leurs – rares – combats à venir. Les lutteurs sénégalais perpétuent une tradition ancestrale. Avant l’assaut, ils s’aspergent le corps de sable, pour que les mains ne glissent pas sur les peaux gorgées de sueur. Ces colosses s’affrontent ainsi pendant une bonne heure avant d’entamer la partie musculation et assouplissement. La lutte traditionnelle sénégalaise existe aussi sous la forme de lutte avec frappe, comme à la boxe. Elle marie sport et culture, avec des chants de bravoure, et des pratiques mystiques sous la forme de grigris. Cette lutte est désormais un phénomène qui intéresse toutes les couches de la population et qui a détrôné le football pour devenir le sport n°1 au Sénégal.

lutteurs

Le blues de Moussa, chauffeur sénégalais

La corruption ordinaire. Le billet de 1000 francs CFA glissé dans la main du gendarme pour avoir le droit de reprendre la route après un contrôle inopiné. Un quotidien dont les Sénégalais ne veulent plus. Ils le disent. En secret. Comme Moussa qui m’accompagna à Joal, la commune où naquit Léopold Sédar Senghor, le père de la République du Sénégal. Son successeur, l’actuel président Macky Sall, a beau faire savoir qu’il déclare la guerre aux corrompus, rien ne change en profondeur. Et la fatigue des chauffeurs grandit. Comme se creuse chaque jour un peu plus la fatigue de leurs voitures.

Moussa

Carnet d’Afrique #7

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Il frôle les poussières rouges le long des routes.
Pas changé leur course à travers les villages depuis toutes ces années. Presque immobiles, il pense. Rien de nouveau ici hormis les quelques dizaines de kilomètres d’autoroute goudronnés en quittant l’aéroport. Les baobabs. À peine poussé. Les détritus. Beaucoup plus qu’avant. Les maisons de fortune. S’amoncellent. Prendre son temps. Le temps donné sans compter. Pas la peine de se hâter. Les poussières rouges traînent leur éternelle patience.

(à suivre)

Carnet d’Afrique #6

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Rares. Les Blancs se font rares.
Quelques Toubabs ventrus traînent leurs rides et leurs 4X4 en direction des serveuses aux tresses brillantes. Les yeux accrochés aux doigts sarments des demoiselles. Osent à peine deviner leurs dents du bonheur au creux de leurs lèvres divines. Il faudrait se taire. Surtout ne rien dire qui vienne gâcher ces secondes de grâce fugace. Mais ils ne savent goûter ce suc. Ignorent le sel du silence. Murmurent un vague compliment sur le tissu de leurs boubous. Aucun regard en échange. À peine un merci susurré sans sourire. Les boissons servies, elles s’échappent d’un pas souple vers la caisse où tinte le petit bruit sec et maigre du franc CFA.
Leur richesse à partager avec qui saura approcher la vive et fière douceur de leur âme.

(à suivre)

Carnet d’Afrique #5

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Le muezzin lance l’appel à la prière.
Des mosquées semées sur les places. Déposées comme à la hâte. Certaines semblent provisoires mais ce provisoire dure depuis des années. Minaret pour les plus grandes. Haut parleur pour toutes. Dès avant l’aube ils vibrent à travers la ville. Comme une plainte répétée chaque jour qu’Allah fait. L’appel, les enfants l’ignorent. Affairés à courir entre les amas de gravier. Entre les tas d’immondices qui peuplent les rues de terre rouge. Entre les murettes défoncées qui s’ouvrent sur de petits champs de menthe. Les enfants jouent d’un rien. Bouchon de bouteille. Canette cabossée. Ballon dégonflé. Cailloux glanés. Le muezzin a beau chanter sa litanie, les petits ont la tête à l’instant. Comme tous les enfants du monde.

(à suivre)