Hiéroglyphes du couchant –
éclats d’or et de feu,
enfin l’été.
feu
Péter le feu
Me suis mieux débrouillé qu’hier avec le feu
tellement maladroit suis souvent
impatient aussi qu’il se déploie
là, j’ai bien laissé respirer le petit bois
et ne l’ai pas de suite assailli de grosses bûches
peut-être ai-je aussi été aidé en secret
par ce livre reçu dans la matinée chez mon libraire
Rimbaud, la Commune de Paris…
de quoi péter le feu pendant quelques temps
Mon poële parle
Mon poêle parle et je l’écoute au fil des heures
sans me lasser
me cale sur son rythme son langage
ardent virevoltant bouillant
pourtant il claque des dents puis se tait se meurt puis recommence
différent ressuscité
feutré discret presque effacé
sans question sans manières sans souci du temps qui passe
sans autre désir que ma présence
il n’appelle aucune autre réponse que le silence
Shanghai est un petit feu
Tu tombes en pleine rue sur un petit feu peut-être un brasero tout rond et déjà bien rouillé surplombé d’un bidon noir
tu demandes au Monsieur si c’est pour préparer le thé qu’il l’a allumé il ne te répond pas ne te sourit pas te dévisage comme pour te faire comprendre que tu le déranges
il a raison tu le gênes c’est peut-être un rituel précieux une cérémonie en plein air cette sortie de son logis pour lancer son feu et chauffer son eau dans le bidon alors tu t’éloignes
peut-être aussi as-tu mal prononcé le thé 茶 chá et ce faisant en te trompant as-tu lancé un mot méchant ou pas beau alors que ce chá qui s’énonce en remontant la voix joyeusement est une merveille de mot
tu voudrais revenir le lui dire comme il faut mais trop tard le Monsieur a disparu derrière l’épaisse fumée alors tu te consoles en t’appliquant à répéter à voix haute huō qui s’écrit 火 et signifie le feu très facile à écrire et drôlement joli aussi dans son extrême dénuement.
Puiser
Puiser
tout au fond du ciel
la lumière d’hiver
journées avancent
à peine rallongent mais
y puiser le feu
vers d’autres matins
Le feu de cheminée
Pour commencer la nouvelle année, écoutons ce feu de bois vivre dans la cheminée de notre maison de famille à Bauduen. Qu’il puisse nous apporter à toutes et tous inestimable amour, paix nécessaire, indispensable santé, précieuse confiance, inépuisable force, intarissable envie de vivre ensemble.
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Pour vivre ici
Je fis un feu, l’azur m’ayant abandonné,
Un feu pour être son ami,
Un feu pour m’introduire dans la nuit d’hiver,
Un feu pour vivre mieux.
Je lui donnai ce que le jour m’avait donné :
Les forêts, les buissons, les champs de blé, les vignes,
Les nids et leurs oiseaux, les maisons et leurs clés,
Les insectes, les fleurs, les fourrures, les fêtes.
Je vécus au seul bruit des flammes crépitantes,
Au seul parfum de leur chaleur ;
J’étais comme un bateau coulant dans l’eau fermée,
Comme un mort je n’avais qu’un unique élément.
Paul ÉLUARD (1895 – 1952)