Un répit éclair –
avant la quête,
vers les petits insectes.
Haiku
Parfois la paix (Haikus de peu)
Peupliers peuplés de pies –
parfois passe le ponant,
parfois la paix
Pauvres pioupious de passage –
parfois perce la pluie,
parfois la paix
Par dessus nos pauvres plis –
parfois pousse la plaie,
parfois la paix.
Vous avez l’éclat de la rose
Roses de juin –
Promesses éphémères,
l’été en embuscade.
Vous avez l’éclat de la rose – Moussu T e lei Jovents
Les grues sauvages
Shanghai est un vendredi treize porte-bonheur
Inédit et béni ce vendredi treize vrai porte bonheur invité à rencontrer collégiennes et collégiens du Lycée français de Shanghai Campus de Pudong pour parler écriture blog histoire poésie autour de mes livres et d’abord de Marseille inconnue de la plupart de ces minots Marseille rouge sangs en mains le s final de sangs les intrigue pourquoi Monsieur pourquoi ce pluriel tu expliques la multitude des sangs qui coulent dans tes veines comme tant et tant de Marseillais la cité la plus vieille de France accueille des gens de partout du monde entier depuis plus de deux mille six cents ans c’est notre fierté première tu parles aussi respect des différences richesse des métissages l’ouverture sur la mer la chance que c’est l’Afrique non-loin parler de l’OM aussi bien sûr de la magie des calanques le scandale des piscines municipales fermées l’été par la municipalité la vie très dure dans les quartiers délaissés abandonnés la violence qui en découle le chômage de masse et puis se souvenir des canons tournés par Louis quatorze sur la ville rebelle et le rouge du titre le rouge de la lutte et du courage rouge sangs oui forcément le Japon ensuite En attendant la pluie le petit conte ton deuxième livre intrigués par le côté pile en français et face en japonais leur parles de Momomi qui l’a si joliment traduit du tsunami sur la côte est le onze mars deux mille onze de la ville de Kamaishi meurtrie et de ces gamins en photo au milieu du livre auxquels il est dédié ils ont dessiné la pluie leurs dessins côtoient des haïkus de grands maîtres japonais Alphonse Richard enfin le dernier né de la famille le premier Dignois tué à la Grande Guerre et là les visages se ferment encore quand tu évoques la tragédie qui ouvrit le siècle passé le destin brisé de tant de jeunes hommes la vie foutue de parents d’amoureuses aux promis tombés si loin des villages natals Alphonse qui tombe le quatorze août quatorze et le souvenir de ta grand-mère à jamais endeuillée son chéri ne revint jamais à Bauduen la souffrance du peuple allemand aussi comment la passer sous silence les yeux des collégiens ne lâchent pas les tiens et tu ressens à quel point ils te comprennent la guerre est une monstruosité dans chaque camp et enfin un moment de pur enchantement auprès d’élèves de cinquième en cours de français avec Antoine leur prof passionné aux yeux malicieux son désir de les voir écrire eux aussi les écrivains ne sont pas les seuls à pouvoir écrire tu leur as dit en préambule oser il faut aller vers ce plaisir écrire lorsque ça palpite en soi lorsque le désir de faire sonner les mots tape à la porte enchantement oui lorsque tu leur proposes d’écrire un haïku trois thèmes au choix la lune l’été la nature et bien sûr la consigne des dix-sept syllabes à respecter si possible avant qu’ils prennent le stylo tu leur en lis quelques uns Issa Basho Sōseki l’évanescence des choses comment la dire comment l’écrire oui c’est possible poésie fugace et la ruche se met à palpiter en douceur puis des Monsieur Monsieur jaillissent des doigts se lèvent tu te rapproches de chacune et de chacun quelques syllabes en trop quelques mots à ôter parfois aussi tu suggères tu mets sur la voie tu transmets transmettre enchantement te souviens de ton premier cours d’allemand les premiers mots transmis par Monsieur Maurer à la fine moustache noire Bär ours Himmel ciel Vögel oiseau ces mots écrits vivants sur le cahier les prononcer à voix basse transmettre oui enchantement car la récolte est belle le miel savoureux les enfants ont laissé parler leur cœur et tu bénis ce vendredi treize en rentrant dans la nuit de Shanghai écouter avec Noémie les petits bijoux que voici
La nature m’émerveille
le monde m’enchante
comme la brise du vent
Hugo
Quand le sang coule
dans les rues de la lune
il est temps d’agir
Victor
Sous la lumière
blanche et humide
les animaux festoient
Stan’
Les animaux sont
émerveillés devant moi
et tombent en amour
Théo
Le soir je regarde la lune
brillante et vaste
comme l’amour
Oscar
J’adore la nature, la verdure
elle abrite la vie
que je chéris
Clément
Le portail s’ouvre
le grand portail de l’été
grande fête dans les rues
Marie
Malheur et terreur règnent
dans les abysses profonds
avec les démons
Flavie
Les astres célestes
brillent dans les yeux
de l’enfant émerveillé
Marie
Belle mère nature
pousse en silence
dans toute sa prestance
Prune
La lune astre du ciel
éclaire la terre
de sa brillance
Baptiste
Ce monde m’effraie
ce monde m’émerveille
c’est mon univers
Lili
L’obscurité règne
elle me tend la main
et je pars avec elle
Chloé
et grand merci à l’équipe pédagogique pour l’accueil chaleureux et l’extrême gentillesse Anne-Laure Fournier Sylvie Fondeville Antoine Decossas les professeurs Élise Doux Guillaume Tournier les documentalistes Stephan Anfrie le proviseur adjoint.
Lune éphémère
Oseras-tu te poser
en mon nid de fortune
lune éphémère ?
Le destin des pétales
Couvrir d’amour les rues
et y mourir
le destin des pétales
Comme une fourmi
Sous les grands pins
se prendre pour une fourmi
allongée sur le dos
Juste une frange de mer
Juste une frange de mer
pour nourrir le désir
de traverser
Nos douze haïkus pour Kamaïshi
Il y a quatre ans
avec ma fille Zoé et mon fils Marius
avions choisi et lu à voix haute quatre haïkus chacun
dédiés aux enfants et aux parents de Kamaïshi,
cette ville du nord-est du Japon
tragiquement frappée par le tsunami
il y a six ans jour pour jour
le 11 mars 2011
Les haïkus de Zoé
Entouré de branches mortes
il se redresse
le printemps !
Ishikawa Keirô
Comme un bloc de nuit voilée
perdu dans mes pensées
Katô Shuson
Viens écouter la glace
qui se craquelle sur le lac
Ozawa Minoru
Quand une tortue crie
l’autre lève la tête
pour l’écouter
Nakahara Michio
Les haïkus de Marius
Voile de lune
une grenouille
trouble l’eau et le ciel
Yosa Buson
Sur le gazon
languissamment retombe
la brume de chaleur
Natsume Sôseki
Dans les brumes de chaleur
quelques trous laissés
par le bâton allé au temple
Kobayashi Issa
A l’entrée du jardin
fleurit le blanc
d’un camélia
Ueshima Onitsura
Les Haikus d’Eric
La lampe éteinte
les étoiles fraîches
se glissent par la fenêtre
Natsume Sôseki
Nulle trace dans le courant
où j’ai nagé
avec une femme
Yamaguchi Seishi
Mon pays natal
détrempé par la pluie
je le foule pieds nus
Taneda Santôka
On vieillit
même la longueur du jour
est source de larmes
Kobayashi Issa