Un livre et des haïkus pour Kamaishi

Couvenattendant-la-pluieDix ans jour pour jour ont passé depuis le 11 mars 2011 et le terrible tsunami qui endeuilla le nord-est du Japon. La ville de Kamaishi pleura près de 900 morts et des milliers de disparus. Deux ans plus tard, en mai 2013, de retour d’un voyage là-bas, j’ai  décidé d’écrire En attendant la pluie, un conte dédié à toutes les personnes que j’y ai rencontrées et qui m’ont bouleversé. Ce petit livre publié aux Éditions Parole est bilingue, en français et en japonais. Il mescle deux langues, deux sonorités, deux cultures. En voici les premières phrases, lues par moi même et par Momomi Machida, qui a traduit le livre.

En hommage aux gens de Kamaishi, si dignes et si courageux, j’avais à l’époque avec mes deux jeunes enfants Zoé et Marius, récité et enregistré quelques haïkus des grands maîtres japonais. Leurs voix ont bien changé depuis mais je me souviens de notre émotion commune ce-jour-là.

14 mélodies du Japon – André Navarra 

Photos de Kamaishi (mai 2013) @ErisSchulthess

Hiver #9 Le temps du souffle d’un soupir

Le nez en l’air comme toujours. Prendre de la hauteur, loin du spectacle pesant d’ici-bas. Lancer le regard ailleurs, vers où se se profilent d’autres rêves possibles. En montagne, vers Gavarnie, il y a de quoi se les dessiner ces autres contrées, au-delà des cimes. Lambiner là-haut, au-dessus des bouleaux, des hêtres, des pins à crochets et des mélèzes.

Profiter de la voie laissée libre à l’avancée, puis constater que le voyage est bien éphémère, rattrapés que sommes par la traîne des jets intercontinentaux et l’inquiétante chaleur de février qui trimballe avec elle le souvenir des glaciers disparus. Revenir sur terre. Au ras des cairns, au fil des écorces et de la neige de début janvier encore en résidence mais lourde d’humidité.

Trouver une trace, soudain. Un isard sans doute descendu dans cette clairière. Peut-être est-il venu s’abreuver au Gave de Pau qui prend naissance ici. Vivace et chantant, le jeune homme glacé. Bien davantage que jadis à cette époque, lorsque les neiges ne se mettaient pas à rendre l’âme au milieu de l’hiver.

troupeaubrebis

Tourner le dos à l’amont. Serpenter dans les vallées. Redescendre. Croiser un berger et sa bergère auprès de leur troupeau de brebis. Juste le temps de se saluer qu’ils ont déjà disparu.

Elles sont de retour, les grues sauvages. À peine parties se réchauffer au sud du sud que les revoilà, en vol d’écrivaines sur les pages du ciel, tantôt grises, tantôt bleues tendre. Ne pas traîner pour en saisir la trace. Elles avancent sur un tempo si décidé les demoiselles, que leurs minuscules messages apparaissent aussi vite qu’ils s’effacent. Le temps du souffle d’un soupir, le concert monocorde de leurs cris et de leur calligraphie s’est évanoui.

radioodawara

De retour à la maison, se connecter sur Radio Garden et filer jusqu’au Japon. Près de 4 heures du matin là-bas. Rechercher la station la plus proche du Mont Fuji. Trouver Odawara FM, en mode radio de nuit. Se laisser embarquer. Pop japonaise et jazz à foison. Souple. Prendre le temps d’en savourer chaque mesure.

 

 

But Not For Me – Chet Baker

Hiver #5 Gabian, yachts et kamikazes

Sur les hauteurs de Cannes j’ai croisé un gabian paisible juché sur une murette et qui contemplait la ville. Il n’a pas bronché lorsque je me suis approché pour lui demander où il nichait, s’il avait des petits, s’il appréciait la vue depuis le Suquet. Il a juste esquissé quelques pas de côté quand il a vu que je cherchais à percer le mystère de son œil jaune assorti à son bec et ses pattes palmées. Puis il est allé se poser en contrebas sur un petit mur en briquettes bistres comme des tomettes. J’avais encore quelques questions à lui poser, alors je suis descendu vers lui sans me presser, en savourant la lumière vive de janvier au bord de la Méditerranée. Lorsque j’ai voulu prendre place à ses côtés, il s’est envolé. Je l’ai photographié. J’aurais bien aimé qu’il m’offre son rire acidulé, mais même pas. J’ai seulement entendu remonter de la ville des cris d’écoliers à la récré et une sirène de bateau de retour des Îles de Lérins. Un de ces quatre, il faudra que j’aille goûter au silence qui entoure les moines de l’Île Saint-Honorat. Les gabians y vivent nombreux paraît-il.

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Un autre matin s’est levé sur les yachts alignés le long de la jetée Albert Édouard, derrière le Palais du Festival. Désertés pour la plupart. Vides de présence humaine, vigiles et agents d’entretien exceptés. Pavillons multicolores, odeur de fric, éclats de luxe, relents de paradis fiscaux. Silencieuse nausée rythmée par le frottement à peine exaspéré des cordes et des bouées sur les coques rutilantes en bord de quai. Culbute de mots et de rime pauvre dans ma tête. Voyage, sabotage, partage, ravage, dommage, abordage.

Mon écoute-podcast de la semaine. Des mots d’adieu à la radio. D’ultimes poèmes avant le départ vers la mort. L’émission L’Expérience sur France Culture les donne à découvrir : « Tombez, fleurs de cerisiers » : 1945, derniers mots de kamikazes japonais. Bouleversant voyage sonore autour des nombreuses lettres adressées à leurs familles, leurs enfants, leurs amis par de tout jeunes soldats, au dernier jour de leur courte vie, la veille de leur ultime mission à bord de leurs avions-suicide. Ces poèmes pour quitter le monde prolongent une tradition aristocratique et lettrée, pratiquée jadis par les moines et les samouraïs.

Envie de rester encore un peu au Japon, et de partager ces trois merveilles dénichées sur Twitter, signées Keizaburo Tejima (Les cygnes), Shiho Sakakibara (Le prunier et la mésange) et Kiyoshi Niiyama (Le temple sous la neige).

Hiver #4 Le Fuji et une apparition

Le retour des engelures, de la goutte au nez, de l’écharpe épaisse et du bonnet. Le givre sur les feuilles,  quelques flocons savourés comme des friandises. Et voilà le désir de Fuji qui renaît.

livreFuji

Ce rêve de monter jusqu’à son sommet se réveille aussi en été lorsque je pars marcher face aux Pyrénées. Mais voilà l’hiver venu et sans trop savoir pourquoi, le désir d’aller un jour tout là-haut se fait encore plus vivace. Chez mon libraire préféré, j’ai aggravé mon cas en dénichant le livre de Dazai Osamu, Cent vues du mont Fuji, dont l’un des récits est dédié à la mythique montagne japonaise. « Ce soir-là, le Fuji était magnifique. Vers dix heures, mes deux compagnons me laissèrent pour rentrer chez eux. Ne dormant pas, je sortis. J’avais gardé ma veste d’intérieur. La lune jetait un vif éclat sur le paysage nocturne. Merveilleux spectacle : sous les rayons de la lune, le Fuji, translucide, avec ses reflets bleutés. Était-ce un renard qui l’avait ensorcelé ? La montagne, bleue comme l’eau ruisselante. Éclat phosphorescent. Feux follets. Étincelles. Lucioles. Hautes herbes. Kuzuno-Ha. Je marchais tout droit dans la nuit. mais avec l’impression d’être sans jambes. Seul résonnait avec clarté le bruit de mes sandales. – dont on eût dit qu’elles ne m’appartenaient pas, que c’étaient des êtres totalement indépendants de moi. Je me retournai doucement et regardai le Fuji. Il était comme une flamme aux reflets bleus flottant dans le ciel. » Me languis d’aller le voir de près. De jour comme de nuit. Et pourquoi pas avec mon James sur le dos ?

 

Ce concerto en mi mineur d’Elgar, interprété par l’étoile filante Jacqueline du Pré au violoncelle (Daniel Barenboïm à la baguette de l’Orchestre Philharmonique de Londres en 1967),  est l’une des œuvres préférées de la violoncelliste Claire Oppert, reçue par Chloë Cambreling sur France Culture et découverte en podcast cette semaine. Quelle découverte ! La musicienne a choisi d’orienter son art vers le soin et de devenir thérapeute musical. Elle a commencé à jouer d’abord auprès de jeunes autistes, puis auprès de femmes et d’hommes qui vivent dans des Ehpad, et puis dans des unités de soins palliatifs. La musique qui soigne, qui apaise, parce qu’elle parle à l’intelligence du cœur. Parce qu’elle a la capacité d’aller chercher à l’intérieur de chacun ce qui est encore intact et source de joie. 

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Une apparition dans le port de Cannes. Ce cygne en face du vieux quartier du Suquet. Affamé, le pauvre. Il s’est approché lorsqu’il m’a aperçu sur le quai. N’ai eu rien d’autre à lui offrir que mon émerveillement. L’ai salué et lui ai confié un autre de mes rêves, tiens, tout aussi vivace que celui du Fuji : réussir à jouer un jour sur mon James ce morceau-là :

 

Le Cygne de Saint-Saëns – Yo-Yo Ma, violoncelle et Kathryn Stott, piano

 

Trois petits tours et puis revient (29) En pleine floraison…

Kamaishi1

 

Contribution #10 J’accueille aujourd’hui l’enregistrement que m’a adressé Toshiko depuis Kamaishi, au Japon : l’air traditionnel Kamaishi Kouta. Merci à elle, du fond du cœur.

 

« Ici on est à Kamaishi, au port de trésor,
Il y a de l’or et de l’argent
C’est un endroit merveilleux
Venez ne serait-ce qu’une fois, venez voir ! »

 

(À demain 8h30…)

image0Photos @ToshikoMiyazaki

« Mon gîte au printemps
Parce qu’il n’y a rien
De rien je ne manque. »

Kobayashi Issa

Les mots pour le dire

« Tu vas être d’accord avec moi, le monde ne nous fait pas de cadeau en ce moment, comme s’il nous disait à tous : vos guirlandes de Noël… vous n’êtes pas près de les ressortir. Et pourtant, ces temps-ci, ma boîte mail m’en offre, des cadeaux. Je reçois de nombreux enregistrements, et ça fait vraiment du bien. Le dernier en date remonte à hier-soir, en provenance du Japon, de Kamaishi. Kamaishi, c’est l’une des villes terriblement meurtries par le tsunami de mars 2011. Cette contribution, vous irez l’écouter dans un instant. Deux photos l’accompagnaient :  des merveilles de cerisiers en pleine floraison. Du coup, je me remets un peu à croire à nouveau à la possibilité d’un Noël, et à la réalisation de l’un de mes rêves les plus grands : grimper un jour jusqu’au sommet du Mont Fuji, la montagne sacrée des Japonais. »

Sur l’arbre

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Juché sur la cime qu’attends-tu vieux voyageur des forêts vers quels horizons tournes-tu ton regard de cyclope étonné tu as pris le temps d’arpenter les sentiers bleus des matins tu t’es glissé entre les précipices tu as frôlé les crevasses du monde et tu l’observes à présent figé d’étonnement ou de stupeur ou de froid qui sait rien ne te protège des tempêtes à venir rien pour t’abriter lorsque approchera en silence à travers les nuages enfantins et les nuées d’oiseaux le grand tremblement qui d’un coup d’un seul nous enveloppera tous de ce noir où tout sera à réécrire repeindre réinventer.

Photo de ci-haut : « On the tree » , œuvre de HiroshiTachibana

En découvrir d’autres sur Twitter

 

Nos douze haïkus pour Kamaïshi

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Il y a quatre ans
avec ma fille Zoé et mon fils Marius
avions choisi et lu à voix haute quatre haïkus chacun
dédiés aux enfants et aux parents de Kamaïshi,
cette ville du nord-est du Japon
tragiquement frappée par le tsunami
il y a six ans jour pour jour
le 11 mars 2011

Les haïkus de Zoé

Entouré de branches mortes
il se redresse
le printemps !

Ishikawa Keirô

Comme un bloc de nuit voilée
perdu dans mes pensées

Katô Shuson

Viens écouter la glace
qui se craquelle sur le lac

Ozawa Minoru

Quand une tortue crie
l’autre lève la tête
pour l’écouter

Nakahara Michio

Les haïkus de Marius

Voile de lune
une grenouille
trouble l’eau et le ciel

Yosa Buson

Sur le gazon
languissamment retombe
la brume de chaleur

Natsume Sôseki

Dans les brumes de chaleur
quelques trous laissés
par le bâton allé au temple

Kobayashi Issa

A l’entrée du jardin
fleurit le blanc
d’un camélia

Ueshima Onitsura

Les Haikus d’Eric

La lampe éteinte
les étoiles fraîches
se glissent par la fenêtre

Natsume Sôseki

Nulle trace dans le courant
où j’ai nagé
avec une femme

Yamaguchi Seishi

Mon pays natal
détrempé par la pluie
je le foule pieds nus

Taneda Santôka

On vieillit
même la longueur du jour
est source de larmes

Kobayashi Issa

Je n’oublie pas Kamaïshi #2

pecheurscoquillages

À Kamaïshi
il a fallu deux années
pour que la mer accueille à nouveau
le travail des hommes

en mai 2013
avec Momomi Machida
avions accompagné les pêcheurs du petit port de Osaki Sirahama,
pour leur toute première récolte d’huîtres et de coquilles Saint-Jacques
depuis le tsunami du 11 mars 2011

le 11 mars 2011
la vague géante avait tué l’un des camarades de ces pêcheurs
95% de leur flotte avait été détruite.
Seulement 30 de leurs 130 maisons avaient été épargnées

 

Je n’oublie pas Kamaïshi #1

2CentredepréventiondesrisquesKamaishi

six ans ont passé depuis le terrible tsunami
qui endeuilla le nord-est du Japon le 11 mars 2011
notamment la ville de Kamaïshi

m’y rendis en mai 2013
en reviens bouleversé
et à mon retour, écrivis un conte
En attendant la pluie
publié aux Éditions Parole
un témoignage d’amitié et de compassion envers les femmes, les hommes et les enfants rencontrés là-bas

Couvenattendant-la-pluie

ce livre est bilingue,
traduit en japonais par Momomi Machida
en avons tous deux lu un extrait
à voix haute
dédié à toutes les victimes du tsunami
ainsi qu’à leurs familles

Ci-dessous trois photos ramenées de Kamaïshi
sourire retrouvé des pêcheurs
jeune maman relogée dans un abri préfabriqué
et espoir vivace de connaître à nouveau des printemps paisibles

4pecheurs

5femmetebébérelogés

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Sur mon banc préféré

img_1219Suis retourné lire au soleil
sur mon banc préféré
après Giono
ai filé au Japon
avec Yasunari Kawabata
séduit par le titre de son recueil de nouvelles
Première neige sur le Mont Fuji
ai savouré les portraits
les couleurs
la douce poésie
qui parcourt chacun des six textes
ai choisi Terre natale
pour partir à voix haute
vers ce Japon
et ce Mont Fuji magique et bien aimé

 

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@Hokusai

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@Emil Orlik

 

Je n’oublie pas Kamaishi

Kamaishiautelgrosplan

Il y a cinq ans jour pour jour, le 11 mars 2011, un tsunami déferle sur la côte nord-ouest du Japon. Parmi les villes frappés,  Kamaishi, située à 208 kilomètres au nord de Fukushima et 560 kilomètres de Tokyo. Des vagues hautes de plus de 30 mètres par endroits ravagent la ville.
Les survivants pleurent plusieurs milliers de morts et de disparus.

Me suis rendu à Kamaishi en mai 2013
pendant une semaine, j’ai pu constater les traces encore vivaces de la tragédie
le port avait retrouvé un semblant de souffle
les enfants étaient retournés à l’école
les pêcheurs d’algues avaient repris leur activité
les ostréiculteurs fêtaient leur première récolte
les tulipes refleurissaient
les bougies accompagnaient le travail de deuil des survivants

Je n’oublie pas Kamaishi
Je n’oublie pas le silence en entrant dans la ville
Je n’oublie pas les immeubles massacrés
Je n’oublie pas les maisons rasées
Je n’oublie pas les voix surgies des décombres
Je n’oublie pas la rade muette au petit matin
Je n’oublie pas le port meurtri de toutes parts
Je n’oublie pas les sinistrés accueillis dans les préfabriqués
Je n’oublie pas l’autel et ses bougies au centre de secours fracassé
Je n’oublie pas les bouddhas de mémoire
Je n’oublie pas les stèles noires dressées
Je n’oublie pas les dates et les chagrins inscrits
Je n’oublie pas les larmes versées
Je n’oublie pas les larmes contenues
Je n’oublie pas les tulipes violettes près du saccage
Je n’oublie pas les traces du tsunami sur la forêt
Je n’oublie pas le temple au moine et à l’enfant
Je n’oublie pas la blanche Kanon protectrice de la ville
Je n’oublie pas le rire timide des écoliers
Je n’oublie pas le sourire retrouvé des pêcheurs d’algues
Je n’oublie pas les jardins refleuris
Je n’oublie pas le retour vers Tokyo en Shinkansen
Je n’oublie pas le survol du Fuji qui m’éloignait de Kamaishi

Je n’oublie pas ce haiku d’Issa

Ainsi en ce monde

au-dessus de l’enfer

on admire les fleurs

 

Se poser sous l’arbre avec Bashō

Saudade. Morriña. Spleen. Déjà plus d’un quart d’année passé au passé. Lassitude. Mélancolie. Soif de quiétude. Se poser sous l’arbre. Relire Bashō en écoutant la musique de Yuki Murata. Retrouver la paix.

Je me remémore

beaucoup de souvenirs

fleurs de cerisier

et aussi

Un moment

nuit de lune

sur les fleurs

Une promenade au parc d’Inokashira

Profiter de ce samedi pour balader dans cet immense parc de l’ouest de Tokyo. Tenter de lâcher prise. Rêver du printemps. Espérer. Essayer de s’assoupir malgré l’animation dans les allées. Relire Rotsû

Colline de hauts cerisiers-

je vais sommeiller

sur une pierre lisse.

et relire Shiki

Au papillon je propose

d’être mon compagnon

de voyage.

 

Trois pages japonaises de Richard Brautigan

Le Journal japonais de Richard Brautigan. Découverte douce et sensuelle. Pendant plus de six mois, en 1976, l’écrivain américain découvrit le Japon et se prit d’une immense passion pour l’Empire du soleil levant. L’esprit des maîtres du Haiku hante ce recueil de poésie. J’y navigue souvent. La nuit notamment. Lorsque mes pensées s’envolent vers mes amis laissés au Japon. Pour prolonger cette écoute, découvrir le travail délicat de Margaux Fédensieu, les douze baies rouges.

LEG mannequin japonais

Les fūrin du matin

Le temple Honmonji. Sud de Tokyo. Dans le vent du matin tintent les fūrin, ces petits carillons au son délicat. À leur battant, il est de coutume d’accrocher un petit morceau de papier sur lequel on a écrit un haiku.

« Les fleurs de cerisiers tombées,

le temple appartient

aux branches. »

Yosa Buson


En attendant la fonte des neiges

De l’eau à profusion. Jaillissement brut sur les pierres. Les oiseaux n’osent approcher. La neige décore encore les branches. Guetter la délivrance. Patienter en relisant les haikus des grands maîtres.

« Dans la vieille mare

a coulé une sandale

tombe la neige fondue. »

Buson

« Si tienne est la neige

tu penses, légère elle sera

sur ton chapeau. »

Kikaku

 

neigeJapon neigeoiseau

Concert d’insectes à Kyōto

Lire des haikus chaque jour m’emmène parfois sur la piste de sons qui proviennent de ce Japon où vécurent les grands maîtres. Kyōto, aujourd’hui. Un concert d’insectes qui me fait rêver du retour des cigales.

« Rien ne dit
dans le chant de la cigale
qu’elle est près de sa fin. »

Bashō

La nuit, soudain un porte-bonheur

Ah, ces nuits d’été rêvées au Japon, lorsque passe le percussionniste avec ses bois porte-bonheur !

M’évoque ce court poème de Richard Brautigan dans son Journal japonais

En regardant mon lit / 3 heures du matin

« Dormir sans dormir,
pour ensuite redormir
sans
dormir. »

Extinction de voies

Se poser. Urgent. Débrancher. Impératif. Écouter la pluie tomber et imaginer le lointain. S’évader au-delà des frontières de ce monde barbare. Sale. Ignoble. Ravaler les adjectifs souillés par tant et tant de salauds. Trop eu envie de crier ces dernières heures. Tueries. Enfants anéantis. Misère galopante. Planète méprisée. Regards détournés au passage de la différence. Égoïsmes à la pelle. Zemmourisation des ondes. Perdu la voix à force de hurler dans ma tête, fracassé par ce spectacle désespérant. Extinction de voies, me semble-t-il. Je deviens défaitiste. Ceci aussi me donne envie de crier. De dégoupiller. D’ouvrir le feu. Extinction de voies. Jusqu’à quand ? Continuer de patienter en écoutant Anoice, le groupe instrumental japonais. Et puis  se remémorer Le cri, le chef d’oeuvre d’Edvard Munch. Relire ce que le peintre norvégien écrivait à propos de son tableau : « J’étais en train de marcher le long de la route avec deux amis – le soleil se couchait – soudain le ciel devint rouge sang – j’ai fait une pause, me sentant épuisé, et me suis appuyé contre la grille – il y avait du sang et des langues de feu au-dessus du fjord bleu-noir et de la ville – mes amis ont continué à marcher, et je suis resté là tremblant d’anxiété – et j’ai entendu un cri infini déchirer la Nature. » Réécouter Anoice.

Un plongeon géant chez Katsushika Hokusai, peintre éternel

Plus de deux heures trente d’attente pour toucher des yeux une merveille absolue, l’exposition Hokusai, l’immense peintre japonais. Magie, délicatesse, sensualité, universalité. Les mots manquent pour décrire ce que j’ai ressenti en approchant les oeuvres de celui qui rêvait de vivre jusqu’à 110 ans pour prolonger sa folie du dessin. En tout, plus de 500 pièces exceptionnelles sont exposées au Grand Palais à Paris. Une grande partie de ces oeuvres n’ont encore jamais été présentées hors du Japon. J’ai été saisi d’une douce émotion face aux estampes d’oiseaux, de fleurs, de femmes, et celles de la série Les 36 vues du Mont Fuji, entre autres devant les myhiques Sous la grande vague au large de la côte à Kanagawa et Vent du sud Ciel clair. Ai trouvé sublime la série Voyage au fil des Cascades des différentes provinces. Découvrir en vrai Katsushika Hokusai est un voyage vers le Japon éternel et universel qui incite au recueillement et au chuchotement.

Hokusai chroniqueur de son époque. Hokusai maître du manga. Hokusai amoureux des oiseaux. Hokusai adorateur du Mont Fuji et de la mer. Hokusai dessinateur hors normes. Hokusai quitté à regret lorsque s’est rapprochée l’heure de reprendre le train vers le sud… Peut-être tenterai-je un nouveau plongeon dans son monde merveilleux d’ici au 18 janvier, date de clôture de l’exposition.

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Dispute d’enfants chinois autour d’une partie de go
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Sifflet de la cerise d’hiver
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Dragon volant au dessus du mont Fuji 1849
Pour prolonger le plaisir, Hokusai se visite aussi sur Arte.

Une hirondelle en hiver

https://soundcloud.com/nobutosuda1101/a-swallow-in-winter

Un son d’hiver. Un nom d’oiseau. Alors que depuis deux jours ici dans le sud s’échappe de la buée de nos bouches lorsque nous parlons, j’ai voulu partager cette évocation poétique d’une hirondelle par Nobuto Suda. Le compositeur japonais nous entraîne en douceur dans le proche basculement vers l’hiver. Les hirondelles, elles, ont déjà pris le chemin de l’Afrique. Pour prolonger cette écoute, découvrir la richesse des oiseaux du Japon sur oiseaux.net et se replonger dans la lecture de haikus de grands maîtres japonais, Issa, Buson, Bashō, ou Sôseki

Sur l’aile du vent
Légère et lointaine
L’hirondelle

Natsume Sôseki (1867-1916)

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Hirondelle, d’après Kano Naonobu (1607–1650)

Stabat Mater sous l’orage

Pas arrêté de pleuvoir ce lundi. À peine mis le nez dehors pour aller chercher le pain. Sinon, ai écouté la pluie taper sur les tuiles, retrouvé le Saleys bourdonnant et me suis passé et repassé le Stabat Mater sous l’orage du compositeur estonien Arvo Pärt. Je ne sais pourquoi j’ai songé à ce Fuji sous l’orage, précisément L’orage sous le sommet de la montagne, l’une des Trente-six vues du mont Fuji du grand maître Hokusai. Et puis j’ai fait une découverte, le Salve Regina du même Arvo Pärt.

En écoutant ces merveilles, ai pensé qu’elles étaient un beau prolongement de mon billet sonore d’hier. Me suis dit aussi que Maman aurait aimé ces voix et cette musique posées au bord du monde et au pied du majestueux Fuji, la montagne sacrée de mes amis japonais.

L’origine du son de la pluie

C’est l’artiste japonais Yugo Nakamura qui a créé cettte bande son à partir d’une multitude de gouttes de pluie enregistrées sur plein de surfaces différentes. Ai découvert cette merveille grâce à Arte Creative. Une pure joie d’écoute. Amplifiée par la tiédeur de ma couette hier alors que des trombes d’eau s’abattaient sur Marseille.

Valse d’automne

Vu passer les grues tout là-haut hier après-midi. M’a semblé qu’elles descendaient vers le sud, fuyant les froidures de ces journées qui n’en finissent pas de raccourcir. Moins de lumière, nous aurons bientôt. Avance transi chaque jour un peu plus. Migrerais volontiers vers les pays chauds, comme ces grands oiseaux. Ici, les heures s’égrènent en catimini, sans un bruit. Dans l’air, j’entends comme une valse d’automne. La pianiste japonaise Yuki Murata a composé ce morceau mélancolique, intitulé Autumn Walz.

Le Mikado c’est rigolo

À l’heure de la sieste hier, Zoé, Empar, Mathilde, Marius et Baptiste se sont bien amusés en jouant au Mikado géant. Tout à côté, sous mon figuier ensoleillé, j’ai rêvé un peu et me suis transporté jusqu’en Chine et au Japon. Ensuite, les rires se sont envolés et nous sommes tous allés nous baigner.

figuier

Et coulent les rivières japonaises en souvenir d’Hiroshima et de Nagasaki

J’ai choisi de partager ce collage de sons des rivières japonaises proposé par Arte Radio pour apaiser le chagrin qui m’étreint en me souvenant de ce sinistre mois d’août 1945.  Hiroshima. 6 août. Nagasaki. 3 jours plus tard. Il y a 69 ans, les Etats-Unis passaient à l’action et commettaient un véritable crime de guerre en lançant des bombes atomiques sur les deux villes japonaises. Ces bombardements ont surtout tué des civils. Ce collage de sons a été réalisé par l’émission Oto no Fukei sur la radio publique NHK.  Les Hibakusha, les survivants des explosions, sont devenus le symbole d’une lutte contre la guerre et les armes atomiques à travers le monde.

Livres de ma vie / Hokusai / Les trente-six vues du Mont Fuji #2

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Hokusai aimait représenter la nature ainsi que la vie quotidienne des gens du peuple, comme les artisans, les paysans, les pêcheurs. Sur l’estampe La rivière Tama dans la province de Musahi, ils sont à l’honneur, au pied du Mont Fuji, au bord de la rivière, comme sur le cours d’eau. Hokusai en rend le mouvement par des lignes ondulées, bleu sombre. Ces vagues légères contrastent avec l’immobilité du décor tout autour. Le Fuji trône, serein et tranquille en toile de fond, au dessus de la brume qui le sépare des eaux mouvantes. J’adore ce tableau qui évoque l’harmonie entre l’homme et la nature. Une harmonie dont la quête – ou la recherche – sont palpables au Japon, comme d’ailleurs en Chine, lorsque l’on regarde vivre les gens.

Livres de ma vie / Hokusai / Les trente-six vues du Mont Fuji #1

Hokusai

Est entré dans ma vie depuis à peine un peu plus d’un an, ce livre. Depuis que j’ai survolé le Fuji à mon retour de Kamaishi, en mai 2013. Fasciné par ce mont mythique je suis. Pas autant que les Japonais qui le grimpent en pélerinage mais bouleversé par sa grandeur, sa paix, sa forme, le cadeau qu’il fait au ciel. Les trente-six vues du Mont Fuji, par Jocelyn Bouquillard, est toujours à portée de main et de regard chez moi. Hokusai se disait « fou de dessin ». Peintre du dix-huitième siècle, il est pour moi inscrit dans l’éternité.

«  LE FOUZI-YAMA, la Montagne sacrée, asile des légendes mystérieuses et des antiques rêveries naturalistes, se dresse dans la fraîcheur des matins bleus et dans l’or du soir. L’air et ses mirages entourent comme de molles écharpes les neiges de son pic, ses flancs de rocher et les forêts de pins qui dévalent les pentes. (…) L’art japonais n’a jamais été traversé par une méditation plus large; jamais ses peintres ne se sont approchés de la nature avec autant de gravité. »

Henri Focillon, Hokusai 1914

Copyright @Seuil / BNF

Livres de ma vie / Haiku. Issa #3

Les cerisiers en fleurs. Ils inspirent les poètes japonais depuis des siècles. Leur floraison ne dure que quelques jours. Peut-être est-ce là que réside la source de l’adoration que vouent les Japonais à ces arbres magiques. Issa leur a dédié de nombreux haïkus. En voici quatre. Empreints d’un souffle qui tutoie l’universel.

 

HaikuIssa

 

« Fleurs de cerisier

dans la nuit – de belles femmes

descendant du ciel »

 

« Cerisiers la nuit

une musique du ciel

qu’écoutent les hommes »

 

« Ce monde imparfait

mais pourtant recouvert de

cerisiers en fleurs »

 

« Fleurs de cerisier –

au milieu d’elles se traîne

le genre humain ! »

 

 Copyright @ Editions Verdier

Livres de ma vie / Haiku. Issa #2

Une vie d’errance à observer le monde. Issa ne cessa de contempler la nature. À l’âge de 28 ans, il partit pour un pèlerinage à travers son pays. Crâne rasé et vêtu d’une simple robe. Il marcha pendant 7 ans. Entouré de fleurs, de vent et d’oiseaux.

 

HaikuIssa

 

« Hirondelles du soir

et pour moi un lendemain

sans le moindre but »

 

« Dans les fleurs de thé

ils s’amusent à cache-cache

les petits moineaux ! »

 

« Viens donc avec moi

et amusons-nous un peu

moineau sans parents »

 

Copyright @ Editions Verdier

Livres de ma vie / Haiku. Issa #1

Issa. Quatre lettres pour un nom qui embrasse toute la poésie du monde. L’un des maîtres du haïku il fut. Fils de paysans japonais. Une vie de moine tissée de deuils et de malheur. Un désir quotidien pourtant de dire « le merveilleux sentiment de vacuité d’où surgit l’événement. » Découvert Issa grâce à ma fille aînée qui me parla de la poésie courte venue de Chine. Ancêtre des haïkus. Issa en est l’un des grands maîtres. Il vécut de 1763 à 1827. Comme si c’était hier. Ses haïkus m’accompagnent chaque jour. Tristes souvent. Merveilleux toujours.

 

HaikuIssa

 

« Lorsque l’on vieillit

même la longueur des jours

est source de larmes »

 

« Une grande paix

son regard perce la haie

moine de montagne »

 

« Là puis envolée

la première luciole –

du vent dans ma main »

 

Copyright @ Editions Verdier

Les gabians de la Canebière

En remontant Canebière tard hier-soir, nous avons été accompagnés par des gabians qui s’époumonaient au-dessus des arbres et des toits. Auparavant, le lancement de mon livre « En attendant la pluie » s’était passé dans une ambiance très amicale au Miyadori-do, le magasin d’art et d’objets japonais de Françoise Potheau. Une quarantaine de personnes présentes. Parmi elles, Messieurs Masaki Sato et Masaki Morimoto, Consul général et Consul général adjoint du Japon à Marseille, Jean Darot, éditeur des Editions Parole et Franck Di Benedetto, 1er adjoint au maire de Digne-les-Bains. Plus de photos, par ici.

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En attendant la pluie, conte japonais

Couv'enattendant la pluieLues par moi même et par Momomi Machida – qui a traduit mon livre – voici les premières phrases de « En attendant la pluie« , un conte en français et en japonais qu’avec l’éditeur Jean Darot, des Editions Parole, nous lançons aujourd’hui à Marseille.

11 mars 2011 – 11 mars 2014. Trois ans ont passé depuis le terrible tsunami qui endeuilla le nord-est du Japon et notamment la ville de Kamaishi où je me rendis en mai dernier. Ce conte, je l’ai écrit à mon retour, en signe d’amitié avec toutes les personnes que j’ai rencontrées là-bas et qui m’ont bouleversé. Pas un jour depuis sans penser à ces femmes, ces hommes et ces enfants. Il me plaît que ce livre soit bilingue, qu’il mescle deux cultures. Je rêve maintenant qu’il voyage au Japon et que nous puissions aller l’offrir à nos amis japonais. Ci-dessous quelques photos ramenées de Kamaishi l’an passé. Elles racontent les stigmates du tsunami, la mémoire vive des victimes et des disparus, le sourire retrouvé des pêcheurs, une jeune maman relogée, et l’espoir de revoir un printemps paisible.

1vestiges du tsunami2Centredepréventiondesrisques3photosurterrassetsunamiarrive4pecheurs5femmetebébérelogés6tulipesstigmatestsunamikamaishi

Dedans, dehors, le vent

Ici, Mars a donc débuté sous le vent. Dedans, dehors, partout. Je l’ai teinté de quelques accords paisibles de Takahiro Kido, musicien et compositeur japonais dont la musique m’emporte souvent vers Tokyo. Vers ce Japon que j’aime et où je languis de retourner. Une pensée amicale pour le poète Francis Royo, amoureux lui aussi de ce Japon magique.

En bonus, voici le dernier opus de Takahiro Kido, intitulé Krageneidechse et composé de 12 petites pièces subtiles et déroutantes.

Jirō, Petit Prince japonais 日本

Éblouissant. Le vent se lève, l’ultime opus de Hayao Miyazaki, est une merveille absolue. Ce film d’animation nous transporte dans le Japon des années 20, des deux décennies qui précédèrent l’horreur de la Seconde guerre mondiale. Le héros se prénomme Jirō. Une sorte de Petit Prince rêveur, profondément généreux et dont la vie est « un avion-nuage » tant l’anime depuis tout petit le désir de voler, la passion des avions. Décors, paysages, expression des visages, bruitages, tout est absolument enchanteur, bouleversant de beauté, de poésie et d’humanité. Sans parler de la bande originale, signée Joe Hisaishi dont voici les trois premières minutes, enregistrées hier au cinéma Variétés à Marseille.

Le titre de son film, Hayao Miyazaki l’a emprunté à une citation de Paul Valéry, extraite du « Cimetière marin » :  « Le vent se lève, il faut tenter de vivre ». Jirō la prononce en français avec l’accent japonais. C’est très touchant.

Dans son blog Métronomiques, Dominique Hasselmann a consacré récemment un superbe billet au film de Miyazaki. C’est par ici.

 

Au fond du jardin, le calme

Là où mes pas me guident aujourd’hui, il y a un jardin. Il s’étale entre quelques clôtures de bric et de broc. Je m’y pose en silence et j’écoute.

https://soundcloud.com/nobutosuda1101/between-3

Between3 est le dernier opus de Nobuto Suda, le compositeur de Kyoto auquel je rend souvent visite.

Le ruisseau des Sauvasses

Mon ami Jean m’a encore gâté. Quelques jours après son océan de l’Algarve, il m’adresse une carte postale sonore depuis la Vallée de la Blanche, dans les Alpes de Haute-Provence. Grand amateur de promenades en montagne, Jean est tombé sous le charme d’un tout petit ruisseau entre deux champs. La carte a été postée depuis le hameau des Sauvasses sur la commune de Montclar, à 1.400 mètres d’altitude.
Cette carte sonore m’évoque les montagnes où j’ai marché jadis. Elle m’emmène aussi vers celles où je rêve de cheminer un jour, comme ces montagnes du Japon dont les Haïkus racontent de si belle manière le charme et le mystère.
Azalées en fleur,
dans le village de montagne
blancheur du riz cuit
Buson
La Vallée de la Blanche, c’est par ici

Soleil d’hiver et temps calme à Kyoto

Prendre le temps de laisser le soleil d’hiver jouer à travers les branches et le feuillage. L’invitation est signée Nobuto Suda, musicien japonais établi à Kyoto.

https://soundcloud.com/nobutosuda1101/winter-sunshine-filtering

Voici son tout dernier opus, où s’écoute le « temps calme » qu’il fait à Kyoto, où « rien ne se passe ».

https://soundcloud.com/nobutosuda1101/the-weather-of-the-day-was-too

Avec Nobuto Suda, nous avions voyagé jusqu’aux pieds du Mont Fuji. C’était en novembre dernier.

Une pensée pour mon ami poète Francis Royo, amoureux du Japon et peut-être un peu dans le dur ces dernières heures… c’est ce que je ressens en lisant son dernier Dires :

« sagesse de l’arrachement. folie de la conscience. qui dois-je donc étouffer pour m’avouer ainsi. cruauté bel œil d’or »

Deux poèmes de Francis Royo

De Francis Royo je ne connais presque rien, sinon qu’il poste chaque jour un poème sur son blog. Simples phrases douces et fulgurantes. Ou bien parfois, vers qui coulent et naviguent depuis des lieux qu’il parcourut, j’en suis sûr, dans ce Japon tourmenté et fascinant. Chaque jour, je guette ces éclats de poésie qui m’émeuvent et me captivent. Pour commencer l’année, je me suis essayé à en réciter deux.

Pour voyager dans Analogos, le blog de Francis Royo, c’est ici.

Histoires d’eaux

De la fenêtre de ma chambre j’entends gronder le Saleys, la rivière qui traverse Salies-de-Béarn. Je vous l’ai déjà donnée à entendre cette rivière, alors, un autre voyage s’impose histoire de découvrir d’autres sons d’eau. D’abord, cap sur l’Islande, auprès du geyser Strokkur. Voici ce qu’il raconte toutes les dix minutes.

Autre destination, le Japon, à la découverte d’un collage de sons des rivières japonaises réalisés par l’émission Oto no Fukei sur la radio publique NHK. Le montage est signé Charlie Marcelet.

La mine d’or, c’est ArteRadio.com

Dans une forêt du Japon

C’est l’histoire de Japonais poètes et ingénieux. En pleine forêt, sur la pente d’une colline, ils ont construit un xylophone. A son sommet, ils ont posé une boule de bois et puis ils l’ont lâchée. Musique !

 Vous avez reconnu Jésus que ma joie demeure de Jean-Sébastien Bach. En fait, chaque lamelle du xylophone a été taillée en forme de V pour maintenir la balle et ensuite la laisser s’échapper dans le bon tempo pour jouer la bonne note ! Ce xylophone en pleine forêt est digne des chefs d’œuvres des Compagnons du tour de France.

Clone

Cette musique colle bien avec la lumière qui perce ce matin à travers les vitres de la maison. Paisible et douce. Clone est l’un des titres du fascinant album A Forbidden Garden que je vous présentais il y a quelques mois. En voici la version longue, issue d’un court métrage tout aussi troublant.
A Forbidden Garden, du label Ricco Label, est composé par les artistes japonais Yuki Murata, Jyunko Tabira, Utaka Fujiwara, Takahiro Matsue, Kei Takahashi, Takahiro Kido

En attendant la pluie

dessinpluie3

J’ai reçu avec beaucoup d’émotion ce matin des dizaines de dessins d’enfants de Kamaïshi, la ville japonaise terriblement endeuillée par le tsunami du 11 mars 2011. L’un de ces dessins illustrera la couverture de mon prochain livre, « En attendant la pluie », un conte que m’a inspiré ce que j’ai vécu en me rendant là-bas en mai dernier. Voici à quoi pourrait ressembler l’illustration musicale de cette histoire dont j’aurai l’occasion de vous reparler d’ici au printemps. Life a été composé par la japonaise Madoka. C’est l’un des sept titres de son second album « I met you in the forest« .

Le petit clip de Life signé Madoka.

Un frisson blanc sur le Mont Fuji

Ce matin, je me suis réveillé entouré de petits flocons blancs. Pas un souffle d’air dans les branches et une douceur, dehors comme dedans, qui m’a aussitôt envoyé de l’autre côté du globe, vers ce Mont Fuji qui m’obsède depuis que je l’ai aperçu au printemps à travers le hublot de l’avion qui me ramenait au pays. Il doit être blanc de haut en bas en ce moment, le mont mythique des Japonais. Alors, j’ai pensé à Nobuto Suda, artiste japonais qui vit à Kyoto, adepte comme moi de la mescle, du mélange de musique et des sons de la nature. J’apprécie la couleur à la fois étrange, inquiétante et apaisante que donne à ses morceaux cet artiste, sorte de musicien-field-recorder. Voici son dernier opus, Preoccupying my imagination, qui date de quelques jours.
Le Mont Fuji, je l’ai approché aussi grâce à Francis Royo, poète-blogueur rencontré sur Twitter, auteur d’un magnifique texte publié sous le titre énigmatique : Yui (Tokaïdo – Satta-Mine 16e relais)
« quatre voiles glissent sur la passe de Satta
sous les crêtes
depuis Yui
le frisson blanc du Fuji
affleure à bords de rocs
l’abrupt enseigne la prudence
et l’écoute
avant le saut fatal du regard
l’abrupt avide de nos cœurs
silencieux de tout
et de l’oubli du vent
passé
perdu
le vide est bleu comme la nuit
qui vient
entre les pins »
Francis Royo
Le blog de Nobuto Suda
 Le field-recording sur le blog Poptronic’s

Mescle de pluie

Je ne sais pas chez vous, mais ce soir, ici en Béarn il pleut et ça fait du bien, c’est très agréable. Après une journée chaude comme tout, l’obscurité a ramené les nuages de l’océan vers l’intérieur et les gouttes ont entamé leur ballet sur les tuiles des toits. Du coup, j’ai cherché et trouvé du bon son de pluie mêlé à de la musique apaisante. C’est Alexander Plaum, chercheur de sons de nature, qui depuis Saint-Pétersbourg nous envoie cette mescle. Nisk Rain est le titre du morceau.

Vous connaissez ma passion pour les haïkus. En voici deux, du grand maître japonais Bashô, que lui a inspiré la pluie.

Voyageur                                                             La pluie brumeuse
ainsi m’appellera-t-on –                                    un jour sans voir le mont Fuji –
première bruine                                                 que c’est agréable

Bashô (1644-1694)

 

Shoganaï, en pensant à Kamaïshi

« Lorsque nous n’avons plus de moyen d’action sur le cours des choses », écrit Rodolphe Alexis, musicien créateur passionné de sons. « Malgré nos prévisions, malgré nos précautions et quelles qu’en soient nos connaissances, nous ne pouvons plus rien. « Il en est ainsi ». Force nous est d’accepter et de faire face, dignement, à l’adversité. « Shoganaï  » disent les Japonais ».Voici la pièce qu’il a réalisée, à l’occasion de la 2ème édition de la « Journée de la Création Radiophonique », en hommage aux victimes du séisme et du tsunami meurtriers du 11 mars 2011 dans le nord-est du Japon.

Rodolphe Alexis est un artiste dont les travaux audio portent notamment sur la prise de son en extérieurs, la composition électroacoustique et l’écriture radiophonique.

 

Finale japonaise 日本

Finale, c’est le dernier titre de l’album « The Black Rain », signé du groupe japonais Anoice. Très prolifique, Anoice a composé une quarantaine d’albums ainsi que des musiques pour la publicité. Le crescendo de Finale est une merveille.
Le site du groupe Anoice, composé de Takahiro Kido, Taku Kanioka, Yuki Murata, Utaka Fujiwara, Tkahiro Matsue et Tadashi Yoshikawa.
Je vous conseille le clip de Finale sur YouTube, teinté de pacifisme

Que vienne la pluie !

Madoka, musicien japonais, a composé ce morceau dont le titre  » Let it rain  » m’évoque ces  chaudes journées d’août qui s’achèvent souvent par un orage bienfaisant
Ce titre est l’un des 7 morceaux qui figurent dans l’album « I met you in the forest « 

 

Hiroshima 広島市

Il y a 68 ans jour pour jour, le 6 août 1945, les Etats-Unis lançaient la première bombe atomique de l’Histoire sur la ville japonaise d’Hiroshima. 140.000 personnes trouvèrent la mort. Voici comment les actualités traitèrent le sujet de la bombe atomique. Document d’archive de l’Institut National de l’Audiovisuel.

3 jours après Hiroshima, ce fut au tour de la ville de Nagasaki d’être bombardée. Bilan : plus de 70.000 morts. Ce mardi, les Japonais se sont souvenus de cette tragédie.

Le site du Musée de la Paix d’Hiroshima

Jardin interdit

Ces notes subtiles et fugaces s’échappent d’un jardin japonais interdit…
A forbidden garden est le second album produit par Ricco Label
Plus d’info, ICI

L’orage et les enfants 日本

En me promenant sur la grande Toile, j’ai déniché ce son du Japon. Produit par « Nature Sounds Society Japan », spécialisée dans l’art du Field Recording, l’enregistrement en pleine nature. Promenade près d’un orage…

Fleurs blanches teintées de vert 日本

Nobuto Suda est un artiste japonais établi à Kyoto, créateur d’ambiances sonores. Il les conçoit comme des poèmes. J’apprécie la douceur et la mélancolie qui émane de ce morceau : « of white flowers tinged with green »
Nobuto Suda est l’un des 37 artistes de la scène Post Rock & ambient qui ont composé des morceaux rassemblés dans l’album « More hope for Japan« , suite au séisme et au tsunami qui ont ravagé le nord est du Japon le 11 mars 2011.

La nuit de pleine lune 日本

Connaissez-vous le dessin de la nuit de pleine lune ? Non ? Vous ne pourrez plus le dire après avoir écouté ce morceau
L’artiste est japonaise. Miho Watarai 渡会美帆 vit à Shizuoka.
Elle est sur Twitter @raizo357

En pensant aux amis de Kamaïshi 日本

Pas un jour sans que je pense à mes amis japonais de Kamaïshi.
Aujourd’hui, c’est en musique que je leur envoie un salut fraternel.
 Ecouter de la musique traditionnelle japonaise dur Deezer

Le lundi au soleil levant

Je ne suis pas vraiment fan de Cloclo. Jamais été touché par ses chansons. Ni amusé. Mais comme je suis tout sauf sectaire, je m’amuse à écouter cette version japonaise du tube « Le lundi au soleil ». Extrait
Le chanteur s’appelle Saeki Kenzo. Il a aussi sorti un album de reprise de quelques chansons de Gainsbourg, intitulé « L’homme à la tête de sushi ».

日本 Hietsuki Bushi, c’est joli

Pour prolonger mon récent séjour au Japon, je cherche des sons de là-bas, musicaux entre autres. J’ai découvert le groupe Omokoda, qui mixe des chansons folkloriques traditionnelles japonaises et de la musique électronique. J’adore. Voici un extrait du morceau Hietsuki Bushi
La superbe vidéo de Hietsuki Bushi sur YouTube, réalisée avec l’artiste Soichi Terada

日本 En musique vers le Mont Fuji

J’ai découvert ça en fouinant sur le web : la route qui mène au Mont Fuji joue de la musique quand on roule dessus. Des rainures sur le bitume ont été disposées de telle façon que les pneus deviennent créateurs de musique
La musique ainsi jouée est « Miagete goran yoru no hoshi wo », une chanson japonaise interprétée par Kyo Sakamoto, chanteur des années 60, décédé en août 1985 dans l’un des pires accidents aériens de l’histoire, celui du Vol 123 de Japan Airlines.

Japon #8 日本 : la jeune fille de Kamaïshi

Naoko a décidé de s’investir pour la reconstruction de Kamaïshi sa ville natale, très durement touchée par le tsunami du 11 mars 2011.

La page Facebook du Projet de Promotion les Échanges Internationaux à Kamaïshi (KIEPProject)

 

Japon #6 日本 : le crieur du métro de Tokyo

Dans le métro de Tokyo ce soir, j’ai été attiré par ce cri qui ressemble à un bonzai d’appel de muezzin

En fait, ce cri émane d’un homme en uniforme bleu avec casque rond sur la tête, tout aussi bleu. C’est un employé du métro qui passe sa journée près d’un escalier, et qui prévient ainsi les usagers de l’existence d’une marche. Au Japon, dans les bus, le métro et dans les gares, le service au public n’est pas un mot lâché en l’air. Le ticket n’est pas donné mais le personnel est présent et le client bien accompagné. Qu’il soit ou non Japonais.

Japon #5 日本 : à la cantine universitaire de Morioka

Les Japonais sont très organisés. Ceci se vérifie dans la vie quotidienne, notamment à la cantine de l’Université de Morioka, au nord-est du Japon, où j’ai déjeuné ce midi

Japon #4 日本 : les pêcheurs de Kamaïshi retrouvent la mer et les coquillages

Les pêcheurs du petit port de Osaki Sirahama, à Kamaïshi, ont fait ce mercredi 15 mai leur toute première récolte d’huîtres et de coquilles Saint-Jacques depuis le tsunami de mars 2011. Je les ai accompagnés en mer

Merci mille fois à Momomi Tachida pour la traduction.

Pour la première fois, donc, depuis mars 2011, ces pêcheurs japonais du Pacifique ont pu envoyer leur production au grand marché de Tokyo. La vague géante a tué l’un de leurs camarades et détruit 95% de leur flotte. Seulement 30 de leurs 130 maisons ont été épargnées.

Japon #3 日本 : les oiseaux de Kamaïshi

Ce matin de très bonne heure, j’ai marché jusqu’au domaine maritime de Kamaïshi, à quelques centaines de mètres de mon hôtel. J’ai entendu en chemin de drôles d’oiseaux au chant répétitif  – en fait, la petite sonnerie qui équipe les feux verts de la ville – et puis des oiseaux en vrai, qui chantaient non-loin des bateaux et des travailleurs du port arrivant à l’embauche, dans ce port dévasté par le tsunami de mars 2011 puis reconstruit.

J’ai posté cette bulle sonore sur Bobler, hier-soir depuis le domaine portuaire de Kamaïshi.

 

Japon #2 日本 : Kamaïshi 2 ans après le tsunami

Nous sommes à Kamaïshi, au Centre de prévention des risques sismiques où les habitants se sont rués après le tremblement de terre – magnitude 9.6 sur l’Echelle de Richter – qui a frappé le Nord-est du Japon le 11 mars 2011. Plus de deux cents d’entre eux y ont trouvé la mort lorsque la vague de 18 mètres de haut a déferlé sur Kamaïshi. Ce bâtiment est resté en l’état depuis. La municipalité veut le conserver en hommage aux victimes.
Deux autels y sont d’ailleurs installés où notamment les familles des victimes et des disparus viennent se recueillir. Ayumi AOYAMA raconte

J’ai posté cette bulle sonore sur Bobler, devant le Mémorial du tsunami, dressé face à l’Océan Pacifique.

 

Japon #1 日本 : bulle sonore

Bobler est en panne. Cette application qui me permet d’envoyer des bulles sonores d’où je veux depuis mon Iphone, ne fonctionne pas à Tokyo. Mon hôtel est pourtant doté de la wifi… Alors, voici ce que voulais raconter hier-soir dès mon arrivée dans la capitale japonaise
Juste avant d’atterrir sur l’aéroport de Tokyo Narita, j’ai rédigé ce petit haiku :
Il se leva –
avion plein, yeux rougis
loin Shanghai
ici Tokyo

Le son du départ

Dans quelques heures, je m’envole pour Shanghai. J’y séjournerai une semaine. Ensuite, je passerai une semaine au Japon. J’ignore s’il me sera possible de blogger au quotidien comme je le fais depuis maintenant plus de quatre mois, notamment parce qu’en Chine, l’accès à internet est assez contrôlé. Je tenterai, bien évidemment. Je continuerai d’exercer ma curiosité pour tous les sons, tous les bruits, toutes les paroles, toutes les musiques. Je ne cesserai pas d’enregistrer. Si je ne parvenais pas à publier, patience. Retour au pays dans quinze jours. D’ici là, prenez soin de vous. Et bon vent

Les cerisiers de Kamaïshi

Les cerisisers. Ce thème traditionnel japonais a été joué hier à Digne en la cathédrale Notre Dame du Bourg, lors d’un concert destiné à recueillir des fonds qui contribueront à aider la reconstruction de la ville de Kamaïshi, très durement touchée par le tragique tsunami du 11 mars 2011. Au piano, Keiko Kuida et à la flûte, Cyril Javanaud.
Le sakura  – cerisier ornemental au Japon – sur Wikipedia
Les cerisiers et le tsunami, un blog à découvrir

12 Haikus pour Kamaïshi

Voici douze Haikus, douze poésies courtes écrites par des poètes japonais d’autrefois. Avec mes enfants Zoé et Marius, nous avons choisi d’en lire quatre chacun et de les dédier aux enfants et aux parents de Kamaïshi, cette ville du nord-est du Japon tragiquement frappée par le tsunami du 11 mars 2011.

Les Haikus de Zoé

Entouré de branches mortes
il se redresse
le printemps !

Ishikawa Keirô

Comme un bloc de nuit voilée
perdu dans mes pensées

Katô Shuson

Viens écouter la glace
qui se craquelle sur le lac

Ozawa Minoru

Quand une tortue crie
l’autre lève la tête
pour l’écouter

Nakahara Michio

Les Haikus de Marius

Voile de lune
une grenouille
trouble l’eau et le ciel

Yosa Buson

Sur le gazon
languissamment retombe
la brume de chaleur

Natsume Sôseki

Dans les brumes de chaleur
quelques trous laissés
par le bâton allé au temple

Kobayashi Issa

A l’entrée du jardin
fleurit le blanc
d’un camélia

Ueshima Onitsura

Les Haikus d’Eric

La lampe éteinte
les étoiles fraîches
se glissent par la fenêtre

Natsume Sôseki

Nulle trace dans le courant
où j’ai nagé
avec une femme

Yamaguchi Seishi

Mon pays natal
détrempé par la pluie
je le foule pieds nus

Taneda Santôka

On vieillit
même la longueur du jour
est source de larmes

Kobayashi Issa

France Culture vient de consacrer un week-end au Japon, dont l’émission « ça rime à quoi« .